Contribution à l’étude de l’individualité dans les associations verbales. 61
souvent présentée dans son expérience; malgré ce fait, beaucoup
associent immédiatement à chapeau d’autres mots, par exemple
bonnet, chaussure, casque, qu’ils n’ont certainement pas ren¬
contrés souvent associés à ce mot.
Une autre hypothèse, c’est que quelqu’un peut subir momentané¬
ment une forte influence particulière, par exemple celle d’un évène¬
ment récent; ainsi, quelqu’un qui serait allé hier à Brest associerait
peut-être aujourd’hui au mot mer le mot Brest. Mais cette explication
n’est pas admissible pour un ensemble de près de 200 mots.
Il faut donc arriver finalement à admettre chez certains une dis¬
position plus ou moins permanente à ne pas effectuer les mêmes
associations que la moyenne. Cette disposition peut tenir, je crois,
à plusieurs causes. D’abord, il paraît assez probable que quelques
personnes ont une disposition naturelle à s’intéresser vivement à
l’anormal, à éprouver de la surprise, et à retenir en conséquence
fortement associées dans leur esprit les combinaisons peu usuelles
d’idées. Ainsi, une de celles qui ont pris part à mes expériences
présente un grand nombre d’associations anormales comme chien-
toutou, tonner-Zeus, pointu-paratonnerre, etc.
Chez quelques personnes aussi, les associations sont pour une
part importante des associations phonétiques ou graphiques (saveur-
savon, narine-marine, par exemple). Or, chez le plus grand
nombre, de telles associations ne se produisent pas ou du moins sont
très rares. La tendance aux associations phonétiques ou graphiques
chez une personne aura donc probablement pour résultat de donner
un caractère fortement individuel à l’ensemble de ses associations.
Chez beaucoup de personnes, le caractère individuel des réponses
paraît être le résultat d’une certaine faiblesse de leurs associations
verbales. Cette faiblesse peut tenir, je crois, soit à une faiblesse
générale de la faculté associative, soit à une faiblesse spéciale por¬
tant sur l’association des mots. Il n’est pas douteux, en effet, que
certaines personnes sont inférieures à la moyenne quant à la faculté
d’associer entre elles leurs perceptions ou leurs idées, qu’elles ap¬
prennent difficilement et oublient vite ce qu’elles ont réussi une fois
à apprendre. Quant à la faiblesse de la faculté d’associer les mots
entre eux, elle se manifeste chez les enfants qui apprennent et
retiennent difficilement leurs leçons, ou chez les personnes adultes