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dans sa dégénérescence on passe à la valeur relative de ces
syllabes, accent ou quantité, nous l’examinons ailleurs, car
c’est une évolution du vers déjà pleinement constitué. Mais ce
qu’il faut encore déduire de la théorie précédente, c’est Yorigine
du pied.
Nous sommes étonnes dans la versification sanscrite de ren¬
contrer à l’origine des pieds nullement formés de deux syllabes,
c'est-à-dire d’une arsis plus une thesis, mais, ce qui déroute nos
idées, de trois, quatre et cinq syllabes, dans lesquelles deux ou
trois longues semblent tour à tour inviter Varsis à se poser sur
elles. Peu à peu ces pieds s’éliminent et cèdent la place à des
pieds de deux syllabes qui nous semblent familiers. D autre
côté, ces pieds renferment des brèves et des longues réparties
de toutes les manières.
L’explication serait simple et nous la donnons plus loin, en
partant de cette idée du pied purement symétrique, c’est-à-dire
n’ayant pour but que d’établir çà et là un dessin rythmique
pareil entre deux vers, sans marquer en même temps les divi¬
sions du temps. Mais on rencontre une objection. Supposons que
pour établir ce dessin rythmique, l’oreille ait voulu que chaque
vers finit par w —--, comment distinguer s’il y a deux pieds
___|___^iun seul ? Si les Indiens n’y voient qu’un seul pied
jamais deux, c’est qu’ils avaient des raisons pour cela ; et en
présence de pieds inégaux composant le vers, la raison ne
peut être que celle-ci : on a pris d’abord pour type un mot
entier dont la quantité était marquée _---; plus tard cette
quantité, au lieu de se trouver en un seul mot, put se rencontrer
en plusieurs, mais la réunion quantitative continua à former le
même agrégat.
La même évolution se rencontre dans la métrique arabe. Les
Arabes désignent encore leur pied par certains mots : le pied
mafâïlon, \e pied mafâalaton, le pied fâ ilon, etc., ce qui indique
bien qu’à l’origine c’étaient des mots de tel nombre de syllabes
et de telle quantité qui devaient se placer à telle place du vers.
Telle est bien l’origine du pied. Il ne devient que plus tard
une mesure du temps. Il n’est d’abord qu’un instrument de con¬
cordance du dessin rythmique. Il reste l’image du mot entier qui
remplissait cette fonction.
Le pied est le mot rythmique substitué peu à peu au mot