CHAPITRE II
LES SCIENCES NATURELLES A LA CAMPAGNE
Il y a quelques années je me trouvais en Normandie, jouissant,
au milieu de la plus cordiale hospitalité, du calme que procure la
campagne. Mes hôtes et moi nous prenions plaisir à mettre en
pratique les principes de la physique sans appareils et à les appli¬
quer aussi à l’étude des sciences naturelles.
Les souvenirs de cette époque comptent parmi ceux qui se
rattachent aux plus charmantes heures de ma vie, parce que
tous nos loisirs étaient intelligemment occupés. Chacun s’ingé¬
niait à fournir le sujet de quelque observation curieuse ou de
quelque expérience instructive; l’un de nous faisait une collec¬
tion d’insectes, l’autre étudiait la botanique. Le jour, on pouvait
nous surprendre, une loupe à la main, considérant sous le verre
grossissant la branche d’un rosier où des fourmis s’occupaient
à traire des pucerons1. Le soir, nous admirions avec une lunette
astronomique les volcans lunaires et les planètes alors visibles.
Si le ciel n’était pas pur, on restait au logis et, l’œil braqué con¬
tre l’oculaire du microscope, on regardait sous un fort grossis-
1. On sait que les fourmis, en chatouillant l’épiderme des pucerons, y dé¬
terminent la sécrétion d’une matière visqueuse dont elles se nourrissent.
Les fourmis emportent parfois les pucerons dans leurs demeures, et les y
enferment; on peut dire qu’elles ont ainsi des vaches à l’étable.