K. GOLDSTEIN. — ANALYSE DE L’APHASIE ET ESSENCE DU LANGAGE 435
étude. Il faudrait pour le résoudre construire tout un système de
biologie, système dont n’existent encore que les premiers linéaments ;
aucune tâche n’est plus importante à mon sens. Une pareille biologie
aurait à rechercher ce qui fait l'essence individuelle des organismes
et à déterminer à partir de cette donnée le véritable caractère des
faits que nous appelons soit physiologiques, soit psychologiques.
C'est ainsi que la description des phénomènes d’aphasie exigerait
que l’on commençât par exposer la théorie de l’organisme humain,
de son activité et des modifications morbides de cette activité, et
qu’on entreprît l’étude de toutes les manifestations verbales dans
leur rapport avec le comportement général dans chacun des cas
envisagés. Il nous faut renoncer, bien entendu, à donner à notre
exposé des phénomènes aphasiques, une base systématique aussi
complète. Mais nous voudrions cependant fixer quelques principes
sous forme de thèses dont on trouvera la démonstration détaillée
dans d’autres travaux.
Nous pensons1 que l’organisme fonctionne toujours comme un tout.
Toute excitation qui agit sur lui produit une modification du système
entier que cet organisme représente. C’est pure apparence si les réac¬
tions semblent localisées dans des portions circonscrites de l’organisme.
La modification totale de l’organisme se caractérise toujours par une
« articulation » interne qui, en même temps, détermine la manière dont
l’excitation se répand dans tout le système organique. Cette « articulation »
et, par conséquent, la distribution de l’excitation varient avec les opéra¬
tions dout il s’agit chaque fois. Et c’est en vertu de cette « articulation »
que les effets sont plus visibles sur tels points que sur tels autres,
l’essentiel de celte « articulation » consistant à favoriser une certaine
région plus ou moins étendue par rapport au reste de l’organisme. Nous
appellerons processus dominant ce qui se passe dans cette région privilé¬
giée qui est ébranlée de façon spécifique et occupe le centre de l’action
totale. Ce qui se passe dans les autres régions, loin d’être indifférent pour
le processus dominant, lui fournit en quelque sorte l’atmosphère au
milieu de laquelle il s’accomplit ; c’est le processus d’arrière-plan. Au pro¬
cessus dominant répond l’opération de mise-en-relief, la « figure » ; au
processus d’arrière plan répond le « fond », d’où se détache la figure! La
tâche imposée à l’organisme détermine chaque fois ce qui est mis en
relief et ce qui appartient à l’arrière-plan ; la répartition varie selon les
excitations auxquelles cet organisme se trouve exposé. La valeur fonc-
1. Cf. l’article du Handbuch der Physiologie cité plus haut.