K. GOLDSTEIN. — ANALYSE DM L’ÆPRASIE ET ESSENCE DU LANGAGE 47a
soit si malaisé, voire presque impossible, de fixer do façon durable tel
mode défini des phénomènes. On est toujours frappé de voi r comme iis
sont; facilement poussés à changer leur classement sous, l’influence
d’une; qualité particulière qui s’impose à eux à un moment, par
exemple, la clarté ou la chaleur de la teinte, — comme- ils sont
instables, en un. mot. Pour conserver à l'attention une orientation
déterminée, il faut pouvoir abstraire de façon catégorielle une cer¬
taine qualité des objets. Même quand les malades semblent ordonner
les.objets d'après un principe, par exemple d’après la clarté de; la
teinte, ce n.’esl vrai qu’en apparence. En fait, ils sont.poussés* passi¬
vement vers ce classement par la clarté des écheveaux qui s’impose
à eux, après quoi ils sont poussés vers un autre groupement par
quelque autre particularité saillante. Il nous arrive aussi de nous
conduire d’une manière analogue;, mais nous pouvons agir tout
autrement : nous;pouvons garder une direction d'attention choisie,
malgré toutes les autres particularités qui cherchent à s’imposer a
nous ; nous pouvons surtout; choisir volontairement telle direction,
par exemple, pour prendre le cas le plus fréquent,, nous en tenir à là
teinte fondamentale. Le malade est hors d’état d’adopter cette atti¬
tude « volontaire ».
Quels, sont: les rapports entre la difficulté à trouver les mots- et
cette modification de Vattitude générale à Végard du monde, exté¬
rieur ? Cette difficulté est-elle la cause du changement d’attitude?
Le trouble du langage est tellement apparent que l’on est, tenté
d'admettre l’hypothèse qui fait de la difficulté à évoquer les mots la
cause de toutes les autres manifestations morbides. Divers faits tirés
de la psychologie tant normale que pathologique semblent en faveur
de cette hypothèse et montrent que le mot est certainement un très
bon moyen, un moyen presque indispensable de passer de l’attitude
concrète à l attitude catégorielle1. Et cependant nous croyons, Gelb
et moi, devoir repousser cette conjecture. Il nous semble qu’on peut
faire valoir contre elle ce fait qu’il n’est nullement impossible de
réveiller les mots chez ces malades, mais qu’ils auront beau enten-
4. Cf. \\r. v. Humboldt: « Le langage ne représente jamais les objets-eux-mêines,
mais les concepts - que l’esprit s’est formé d’eux dans l’activité autonome par
laquelle il crée le langage. » Einleitung ins Kawiwerk. Werke, Akademie-Aus¬
gabe, VII, p. 90.