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JOURNAL DE PSYCHOLOGIE
réel, mais la difficulté qu’éprouve le malade par suite de la gêne
apportée au déroulement rapide des actes moteurs est cause qu’il se
sent hors d’état d'accomplir normalement sa tâche sous ce double
rapport. Son énergie n’y suffit pas. Il semble qu’il ait à choisir entre
deux possibilités : ou conserver la construction correcte en sacrifiant
l’exactitude des mots, ou supprimer des catégories de mots et sacri¬
fier la construction pour conserver la prononciation. Il est clair qu’il
choisit la conduite qui dans chaque situation est le plus propre à
l’aider à remplir le dessein qui le fait parler, à satisfaire le désir
qu’il a d’être compris. Pour cette raison, il s'efforce de ne pas excéder
les forces dont il dispose, de s’adapter à elles ; toute défaillance de
l’énergie doit conduire à un échec particulièrement grave, vu la
difficulté accrue qu’il éprouve à agir. Il tâche de parer à cet inconvé¬
nient en usant de divers procédés adaptés à la diversité des situa¬
tions. Il est intéressant de voir ici à quel point les fonctions sont
dépendantes de cette distribution adéquate de l’énergie que j’ai
signalée plus haut(cf. p. 438).
D'une forme spéciale de l’aphasie motrice.
Dans de nombreux cas d’aphasie motrice, la modification des
manifestations motrices verbales que je viens de décrire s’accom¬
pagne de troubles dans diverses autres catégories d’activité. La
simple observation amène à distinguer ces malades des premiers
décrits, atteints de troubles purement moteurs. On est frappé de les
voir plus ou moins ralentis ou entravés dans tous leurs actes, même
si dans la vie quotidienne ils ne sont pas sujets à des défaillances
graves. Ils paraissent manquer surtout d’initiative, d’intérêt aux
choses. L’expr,ession du visage en témoigne déjà, par un air d’absence,
d’indifférence, de fixité, souvent aussi de désarroi et d’inquiétude.
Cette modification d’attitude générale n’est ni constante ni
toujours égale, les malades paraissent parfois plus animés, ils
semblent s’intéresser à ce qui se passe, ils ont des mouvements plus
rapides, mieux réglés, leur visage exprime la sympathie, le calme,
la joie, la « présence ». Si on cherche à comprendre ces fluctuations
en examinant de plus près les situations où se manifeste l’un ou
l’autre de ces comportements, on constate d’abord que les malades