0. JESPERSEN. — DE QUELQUES PHÉNOMÈNES DE MÉTRIQUE 335
puisque la seule chose exigée par l’oreille est que la deuxième syl¬
labe soit (relativement) plus forte que la première, que la troisième
soit plus faible que la deuxième et la quatrième, et ainsi de suite.
Une syllabe ayant le degré de force que nous désignons par le
chiffre 2, ou, pour abréger, un 2, est une syllabe forte entre deux l,
et un 3 est une syllabe faible entre deux 4. Si on désigne par le
signe./ tout renforcement et par le signe \ un affaiblissement quel¬
conque, le schéma peut donc s’écrire comme suit, la lettre a signi¬
fiant une syllabe qui se trouve dans une position impaire, et la lettre
b une syllabe dans une position paire :
a/b\a/b\a/b\a/b\a/b [\a).
Si nous comparons deux vers comme
It is aUiipping and an eager air,
et
The course of true love never did run smooth,
nous voyons dans le premier it is a 121 et -ing and a 121, et dans le
second true love nev- 434 : deux extrêmes qui montrent clairement
l'importance de la relativité dans le rythme.
Examinons maintenant les cas où un trochée est substitué à un
ïambe. Dans la grande majorité des cas, cette substitution a lieu
après une pause, et c’est de la facilité avec laquelle on introduit une
pause en différents points du vers que dépend la fréquence des
substitutions : elles sont extrêmement fréquentes au premier pied
et assez fréquentes au troisième et au quatrième, mais très rares au
deuxième et surtout au cinquième pied, car il est toujours peu
naturel de diviser le vers en deux parties de si inégale longueur
(2 4- 8 ou 8 4- 2).
La pause'précédant une syllabe forte nous empêche de la perce¬
voir comme succédant immédiatement à une autre syllabe forte ; en
conséquence on n’y trouve pas d’anomalie. Ce n’est donc qu’à partir
de la transition de la première à la deuxième syllabe que l’oreille
peut découvrir une déviation du schéma. Or, l’analyse d’un grand
nombre de vers danois, anglais et allemands montre que les poètes
préfèrent employer en second lieu une syllabe assez forte, les rap-