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GÉOTROPISME DES ANIMAUX.
la géotaxie résulterait de l’action de deux autres forces : la pesanteur, et une force
intérieure qui produit le mouvement. C’est toujours une paire de forces qui produit
l’orientation directrice en général et par conséquent celle de la géotaxie également.
Cette interprétation est purement hypothétique, et dépasse quelque peu la valeur des
faits observés.
Malgré les faits si démonstratifs de Verworn et Jensen relatifs à la nature de la géo¬
taxie, l’idée de l’action de la pesanteur comme irritant géotactique n’est pas tout à fait
abandonnée dans la science. Tout récemment encore, Davenport a vu dans le mécanisme
du mouvement géotactique de bas en haut une action directe de la pesanteur sur l’orga¬
nisme qui réagit négativement. La géotaxie de toute cellule, dont le poids spécifique est
plus grand que celui de l’eau, dépend de la résistance plus ou moins grande que la.
cellule doit vaincre, suivant qu’elle nage en haut ou en bas. Platt, qui a cherché à
vérifier ces faits en déterminant le poids spécifique de Spirostomum, Paramæcium et
du têtard dans ses rapports avec le problème de la géotaxie, est arrivé à la conclusion
que d’une manière générale la pesanteur n’a pas d’action directe sur l’ensemble des
organismes, mais qu’elle agit sur quelque organe interne du corps cellulaire et exerce
ainsi indirectement son action géotactique. Cet organe, analogue aux canaux semi-cir¬
culaires chez les animaux supérieurs et aux otolithes chez les animaux inférieurs, n’est
pas influencé par la densité du milieu et subit l’action géotactique de la pesanteur
indépendamment du poids spécifique de l’animal. Wolfgang Ostwald a déduit de sa
conception physique des mouvements directeurs des organismes inférieurs une nouvelle
théorie de la géotaxie basée sur le principe du frottement interne de l’eau qui contient
les infusoires. Tout phénomène tactique est dominé par deux facteurs : par le frotte¬
ment interne de l’eau qui influence l’étendue des mouvements natatoires et par les
variations continuelles que subit ce frottement sous l’influence des mouvements produits
parles irritants tactiques. Ces principes s’appliquent aussi au mécanisme de la géotaxie.
L’intensité variable du frottement interne de l’eau à des hauteurs différentes rendrait
plus ou moins faciles les mouvements natatoires des organismes excités géotactiquement.
Si ingénieuse qu’elle soit,la manière de voir d’OsTWALD n’est qu’une conception hypothé¬
tique, à laquelle manque encore l’appui de faits expérimentaux. Il importe de remarquer
que déjà en 1889 Verworn avait attiré l’attention sur le rôle possible du frottementdes par¬
ticules d’eau avec le corps des infusoires dans la production des mouvements géotactiques.
Ce frottement agirait comme un faible irritant mécanique, ainsi que cela a lieu dans la
rhéotaxie. Plus tard, Verworn abandonna cette manière de voir, la théorie des diffé¬
rences de la pression hydrostatique lui ayant paru plus conforme aux faits observés et
expliquant mieux le mécanisme du phénomène géotactique.
Quoi qu’il en soit de toutes ces théories, il est certain que la pesanteur n’agit qu’in-
directement sur la mise en axe des organismes et sur leur orientation géotaclique et n’est
pas un irritant direct du protoplasma cellulaire. Chez les animaux qui vivent dans l’eau,
les différences de pression hydrostatique expliquent d’une façon très satisfaisante et très
complète la nature et le mécanisme des phénomènes de géotaxie. Il est probable que cette
interprétation, du moins dans ses principes fondamentaux, s’applique également àla géo¬
taxie de certains animaux vivants sur terre ou dans l’eau,les différences de pression d’air
pouvant exercer sur les organismes des actions excitantes analogues à celles de la pression
hydrostatique. Quanta la géotaxie des animaux supérieurs pourvus d’un système nerveux,
il a été déjà dit plus haut que les réactions géotactiques chez ces animaux sont très com¬
plexes et très probablement liées à des organes spéciaux d’orientation dont nous n’avons
pas à nous occuper ici et pour lesquels nous renvoyons à l’article Orientation de ce Dic¬
tionnaire.
Rôle biologique de la géotaxie. — Il n’est pas douteux que la géotaxie, seule ou com¬
binée à d’autres tactismes, prend une part considérable aux diverses manifestations de la
vie. Elle intervient d’une manière très active dans plusieurs phénomènes vitaux qui
contribuent à la conservation de l’espèce. C’est un moyen de conservation, et en même
temps un moyen de défense, qui permet à l’animal d’éviter les actions nocives et de se
placer dans des conditions favorables à son existence et à son alimentation. Un
grand nombre de phénomènes très importants de la vie en général, et de la vie élé¬
mentaire en particulier, trouvent leur explication dans les réactions géotactiques. Mais