CŒUR.
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le deuxième bruit disparut alors tout à fait et fut remplacé par un bruit de sifflement.
Lorsque le crochet et l’alène furent retirés, le deuxième bruit reparut, et le sifflement
cessa de se faire entendre.
En 1835, un comité se réunit à Dublin et formula les conclusions suivantes :
1° Les bruits du coeur ne sont pas produits par le contact des ventricules avec le
sternum et les côtes; mais ils sont le résultat de mouvements qui se passent en dedans
du coeur et de ses vaisseaux.
2° Le sternum et la paroi antérieure du thorax, par leur contact avec les ventricules,
ajoutent à l’éclat de ces bruits.
3° Le premier bruit correspond à la systole ventriculaire et coïncide avec elle en durée.
4° La cause du premier bruit est de nature à commencer et à finir avec la contraction
du ventricule, et cette cause est active pendant toute la durée de la systole.
5° Le premier bruit ne dépend pas de l’occlusion des valvules auriculo-ventriculaires
au commencement de la systole, car ce mouvement des valvules n’a lieu qu’au commen¬
cement de la systole, et dure beaucoup moins qu’elle.
6° Le premier bruit n’est pas non plus produit par le frottement des surfaces internes
des ventricules l’une contre l’autre; car un frottement semblable est impossible avant
que le sang soit expulsé du ventricule, tandis que le premier bruit commence avec le
début de la systole ventriculaire.
7° Le premier bruit est produit, ou par le passage rapide du sang sur les surfaces
internes et irrégulières des ventricules pour arriver aux orifices des artères, ou par le
bruit musculaire des ventricules, ou, ce qui est probable, par l’une et l’autre de ces deux
causes à la fois.
8° Le deuxième bruit coïncide avec la terminaison de la systole ventriculaire. Pour
qu’il soit produit, il faut que les valvules artérielles (aortiques ou pulmonaires) n’offrent
aucune lésion. Ce bruit semble être causé par la résistance subite qu’opposent ces val¬
vules au mouvement rétrograde des colonnes sanguines repoussées par l’élasticité des
troncs artériels vers le cœur, après chaque systole des ventricules.
Un troisième comité réuni à Philadelphie institua des expériences analogues sur des
veaux, des moutons et des chevaux. La conclusion générale fut que le premier bruit,
coïncidant avec la contraction ventriculaire, est dû surtout à cette contraction et en
partie aussi au claquement des valvules auriculo-ventriculaires; le deuxième bruit recon¬
naît pour cause unique l’occlusion des valvules sigmoïdes redressées par le choc en retour
de l’ondée artérielle.
Chauveau et Faivre reprirent l’étude de la question par des expériences sur des che¬
vaux adultes. Les comités anglais saisissaient à pleine main les deux troncs artériels,
vers leur origine, pour intercepter complètement la circulation à leur intérieur. Or, alors
le claquement des valvules sigmoïdes est rendu impossible, et le deuxième bruit est
tout à fait anéanti; c’est donc à ce claquement valvulaire qu’est dû ce deuxième bruit.
Chauveau et Faivre, pour empêcher l’abaissement des valvules sigmoïdes sans interrompre
la circulation, introduisirent dans les troncs artériels un trocart droit dont la gaine ren¬
ferme plusieurs lames élastiques. L’instrument est enfoncé jusqu’au-dessous du niveau
des valvules sigmoïdes pendant qu’elles sont relevées; puis la gaine du trocart est retirée
pour permettre l’écartement des lames élastiques, qui s’appliquent alors entre les val¬
vules et les empêchent de s’abaisser. On détruit ainsi le deuxième bruit, soit dans les
deux artères, soit dans l’une seulement, et l’on entend très bien à la place un souffle doux
après chaque systole du ventricule, souffle produit par le retour du sang dans ces
cavités.
Par la section des valvules auriculo-ventriculaires, ou bien en introduisant par une
très petite ouverture de l’oreillette une tige de fer terminée par un anneau, dans
l’orifice auriculo-ventriculaire, de façon à empêcher l’appontement et la tension des
valvules, le premier bruit est remplacé par un souffle. Peut-être, ajoutent Chauveau et
Faivre, ce premier bruit est-il renforcé par le choc du cœur contre la paroi thoracique.
On ne peut pas objecter à cette explication, disent Chauveau et Arloing, que le premier
bruit, s’entendant sur toute la surface du cœur, et surtout, avec son maximum d’intensité,
vers la pointe, ne saurait être engendré par une cause qui siégerait aux orifices auriculo-
ventriculaires. En effet, la tension brusque des valvules sous l’effort du sang pressé par