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DIABÈTE.
objet la glycosurie alimentaire ; puis nous rechercherons les divers moyens qui ont été
mis en œuvre pour provoquer artificiellement la glycosurie chez les animaux ; enfin nous
analyserons les différents troubles nutritifs qui caractérisent le diabète et tâcherons d’en
fixer la pathogénie.
§ I. Glycogénie et glycolyse à l’état physiologique. — Glycosurie alimen¬
taire. — L’étude de la glycogénie sera l’objet d’un article étendu de ce Dictionnaire.
Nous ne prendrons ici de ce chapitre de physiologie que quelques indications numériques
dont la connaissance est indispensable à la compréhension du diabète. Il faut tout
d’abord admettre comme un fait établi d’une façon suffisamment rigoureuse, que le foie
est un organe producteur de sucre à l’état physiologique. La théorie de Pavy compte
bien encore quelques partisans; mais ce n’est point ici le lieu de la réfuter; disons seu¬
lement qu’il serait impossible de refuser une fonction glycogénique au foie devant les
chiffres obtenus depuis les expériences fondamentales de Cl. Bernard, dans les analyses
comparatives du sang porte et du sang sus-hépatique. Les analyses de Seegen sont parti¬
culièrement instructives; cet expérimentateur arrive à ce résultat que le sang se charge
en moyenne de 0,1 p. 100 de sucre dans son passage à travers le foie. Partant de là, et
de l’évaluation de la quantité de sang qui traverse le foie dans l’unité de temps, il cal¬
cule que chez un chien de 10 kilogrammes cette glande cède à la circulation environ
144 grammes de sucre dans les vingt-quatre heures. Pour un homme de 70 à 80 kilo¬
grammes, le foie fournirait journellement 500 à 600 grammes de sucre1.
Ch. Bouchard donne un chiffre beaucoup plus élevé,mais ses éléments de calcul sont
différents; il admet, d’après Cl. Bernard, que 1 kilogramme de sang artériel perd en deve¬
nant sang veineux 0^r,40 de sucre; abaissant cette perte à 0,20 pour avoir un minimum
(chiffre encore beaucoup trop fort, si l’on s’en rapporte aux analyses de Chauveau) et
tablant sur les calculs de Hering et de Vierordt pour l’évaluation de la durée de la révo¬
lution circulatoire totale, il estime que 1850 grammes de sucre seraient consommés
journellement par un homme du poids moyen de 65 kilogrammes.2
Mais récemment3 il (a dû revenir sur ces calculs et donner à son évaluation une me¬
sure plus juste. En admettant, d'après les dernières analyses de Chauveau et Kaufmann,
que la perte moyenne de sucre par kilogramme de sang et par révolution totale ne serait
guère que 0gr,04, la quantité de sucre détruite chez un homme de 65 kilogrammes en
vingt-quatre heures, se trouve abaissée à 370 grammes. D’autre part, Bouchard arriva
aux mêmes résultats en mesurant directement la quantité de sucre consommée par des
sujets normaux soumis à un régime alimentaire déterminé. Pour cela on ne pèse qu’un
seul aliment, le sucre, et on ne fournit aucun autre hydrate de carbone. Il suffît alors,
pour connaître le poids total du sucre consommé, d’ajouter au sucre ingéré la quan¬
tité de sucre qui s’est formée aux dépens de l’albumine élaborée. Cette dernière se calcule
ff’après la quantité de l’azote urinaire ; il n’y a qu’à savoir qu’à 1 gramme d’azote uri¬
naire total correspondent 6sr,736 d’albumine détruite, et que 1 gramme d’albumine en
se détruisant dans l’économie donne 0gr,558 de sucre. Ce calcul appliqué à cinq sujets
normaux d’âge différent a donné les résultats suivants. (La consommation du sucre est
rapportée au kilogramme corporel d’une part, et, d’autre part, au kilogramme d’albu¬
mine constitutive des tissus, pour une période de vingt-quatre heures) :
SUCRE CONSOMMÉ
AGE.
POIDS.
PAR KIL. CORPOREL.
PARK1L. d’aLB. FIXE.
17 ans ........
|kil.
50,7
gr.
7,2
gr¬
öl,4
25 — ........
65
5,7
38,8
40 —........
• 51,8
5,5
37,6
59 — ........
85,3
2,5
18,2
70 —........
55,5
3,3
22,9
1. Seegen. La glycogénie animale, trad, de Hahn, Paris, 1890, 106.
2. Ch. Bouchard. Maladies par ralentissement de la nutrition, 1885, 152.
3. Ch. Bouchard. La théorie pathogénique du diabète {Semaine Médicale, 1898, 201)..