24 BAROMÉTRIQUE (Pression).
leur carapace devient louche et opaque à la manière de celle des animaux morts et im¬
bibés par l’eau.
C’est donc un fait bien acquis que la pression agit en faisant pénétrer l’eau dans les
tissus de l’animal en expérience. Cette notion nouvelle, la science la doit tout entière
aux travaux de P. Rkgnard (1894). C’est lui qui a démontré le premier que l’excès d’eau
dans les tissus était capable de produire la maladie puis la mort des organismes.
P. Bert l’avait prouvé pour l’oxygène. L’idée n’a rien-d’étrange, d’autant plus qu’il
n’y a pas d’agents naturels qui ne soient capables d’actions nuisibles, quand leur
énergie augmente au delà de la normale.
Quand on examine au microscope les divers tissus d’un animal, après leur avoir
fait subir une pression de 600 à 1000 atmosphères, les lésions qu’on y trouve sont
importantes et nombreuses. Nous en empruntons quelques-unes au livre de
P. Regnard :
Le tissu conjonctif est distendu par l’eau, ses faisceaux sont écartés. Dans les
tendons les fibres sont séparées les unes des autres et baignent dans une atmosphère
aqueuse.
Le tissu musculaire présente des altérations de divers ordres: si la pression n’a duré
que 10 minutes et si l’on examine les muscles profonds, on voit que la striation transver¬
sale est moins nette et que le sarcolemme ne se montre plus à la surface du faisceau
primitif, mais en est légèrement écarté. Les faisceaux sont devenus très friables et se
brisent avec la plus grande facilité. Si la pression a duré quelques heures, les lésions sont
multiples. D’abord le sarcolemme est plus ou moins soulevé. Là striation transversale
n’existe que dans quelques rares endroits, la longitudinale est très irrégulière; généra¬
lement elle a complètemen t disparu. La substance striée est elle-même brisée, refoulée
par l’eau dans le tube du sarcolemme et elle présente successivement des renflements et
des amincissements considérables. Sur des coupes transversales, outre la lésion du
tissu conjonctif ambiant, on voit que les fibrilles des faisceaux musculaires primitifs
sont très écartées. Le protoplasme qui les sépare est très gonflé.
Les nerfs présentent, eux aussi, des lésions notables; en effet, leurs fibres soumises
seulement pendant dix minutes à une pression de 600 atmosphères, ont des incisions
beaucoup plus marquées qu’à l’état normal, et souvent la membrane de Schwann n’est
plus accolée à la couche du protoplasma qui se trouve au-dessus delà myéline, mais en
est écartée plus ou moins. Lorsque la pression est maintenue plus longtemps, les inci¬
sures deviennent encore plus marquées, et, en même temps, on voit qu’au niveau de
chaque étranglement la myéline est refoulée des deux côtés sur une longueur plus ou
moins considérable.
Les globules sanguins sont toujours détruits dans les vaisseaux superficiels.
Les cellules épithéliales paraissent au premier abord intactes, mais un examen plus
attentif montre que l’eau a pénétré dans leur intérieur et a refoulé ce protoplasma au
voisinage du plateau sous la forme de petits grains.
Tous ces examens ont été faits comparativement sur des tissus qui avaient été
comprimés et sur d’autres qui avaient passé le même temps simplement dans l’eau. On
n’a jamais trouvé la moindre lésion sur ces derniers.
La pénétration de l’eau est donc un phénomène évident. Mais comment se réalise-
t-elle ?
P. Regnard suppose que le protaplasma de l’épithélium, la matière même des fibres
musculaires et la myélie des nerfs sont plus compressibles que l’eau, d’une part, et
que leur enveloppe, d’autre part. C’est ainsi que l’eau les refoule et prend leur place;
puis, à la décompression, l’eau, n’ayant pas la possibilité de s’échapper, gonfle les
tissus et les disjoint.
R. Dübois pense que l’eau aux fortes pressions se combine chimiquement aux albu¬
minoïdes, puis, lorsque la décompression arrive, l’eau devient libre et forme des sortes
d’infarctus aqueux qu’on trouve dans les tissus.
L’expérience semble donner raison à la première de ces opinions. Tous ces phéno¬
mènes ont pu être vus par Regnard comme se produisant pendant la compression.
Des muscles de grenouilles placés sous une pression de 100 atmosphères répondent
comme à l’état normal, aux excitations électriques. Mais, aussitôt que la pression dépasse