DIX-
NEUVIEME
SIECLE.
general. La langue du XIXB siecle, c'est1'assen1b1age, 1a reunion de
tous 1es parlers, de tous 1es patois, de tous 1es jargons populaires;
c'est, surtout, 1a ruptxire avec 1es regles du classicisme et 1e retour
a 1a fantaisie, a 1a variete, a 1a riohesse de Pancien franeais. Plus
de n10de propre, toutes les modes; plus de style, tous les styles;
plus de langue, toutes les langues. Pour creer d'e11e-n1en1e, notre
epoque est bien trop savante, e11e prefere mettre a proüt Pheritage
du passe. Voila, ce me semble, 1e veritable a volapilck 1) reve, e11
ces dernieres annees, par des esprits emancipes.
Jadis, 1a Poesie etait impersonnelle; 011 faisait, en vers, des des-
criptions, des reeits, des deolarations; 011 rimait gaiement : avec 10
siecle, est venue Pecole du 1110i, tres caraeteristique, parce que ioutes
ces plaintes, toutes ces aspirations, toutes ces angoisses publique-
ment exprimees s011t 1a preuve de 1a 11011 satisfaction des desirs n10-
dernes ou plutöt de 1a Situation douloureuse faite a Pideal, aux reves
vers 11infini par Pesprit brutalement pratique du n10nde contempo-
rain. Seulement, entre le ((11101 n de Chateaubriand, de Lamartine, de
Victor Hugo, d'Alfred de Musset, et le a moi n des jeunes decadents
de 1892, ily atoute 1a differenee qui separe Palme aux aspirations ge-
nereuses de 1a contemplation boudhique de sa petite personne. Ici,
c'est reellement la recherehe de l'eau-dem fatidiqxle; lä, c'est le be-
soin de se faire remarquer, le fait d'esprits etroits qui se refusent ä
Inarcher et qui croient se rendre interessants en offratnt au public
des travaux de marqtleterie, ou des easse-tete chinois.
Jadis, 1a prose etait le moyen, le vehicule dont se servaient les
penseurs pour exprimer, pour communiquer ä 1a foule leurs senti-
ments, leurs idees, ce qui ne les empeehait pas, eomme Chateau-
briand, si idolätre par ses eontemporains , sacre par Ballanehe a roi
de Pintelligeuce, n d'ecrire quelquefois en un style magique, mais
1a pensee restait toujours maitresse, alle ne se laissait pas detour-
ner par je ne sais quel amour de 1a forme menant ä 1a viduite.
zXujourd7hui, la prose est un art qu'on eultive avee jalousie : il n'y a
plus de penseurs, il y a des seulpteurs, des tailleurs, des eiseletlrs
en phrases, des arrangeurs n, des metteurs en seene n de tableatlx