1191 [ STYLE ]
principe 1. Il est tout simple que chez les civilisations primitives, tout
ce qui emanc de l'homme ait le style: PBlIgIOH, coutumes, moeurs,
arts, vetements, simpregnent de cette saveur empruntee aux observa,-
tions les plus naives et les plus directes. _La mythologie des Vedas, celle
des Egyptiens, decoulant de l'observation des phenomenes naturels,
sont penetrees du style par excellence. Les arts, qui sont une expres-
sion de cette mythologie, possedent le style. Mais, qu'un etat de civi-
lisation complexe, melange de debris anterieurs et confus, puisse faire
Tenant-e dans ses expressions d'art lc style eteint pendant des siecles,
cela est un phenomene peu ordinaire, qui, pour se produire, exige
un puissant effort, un grand mouvement des esprits. Il est evident pour
nous que ce mouvement ne fit que dans une classe de la societe,
qu'il ne fut signale ni apprecie par les autres classes, et c'est ce qui
expiique pourquoi, encore Eilljüllfd hui, il reste ignore du plus grand
1101111319 L'art du a Yecole laique fut alors une sorte d'initiation a des
vfj-rites qui etaient a peine soupconnees, un retour vers un etat primitif,
130m, ainsi dire, au milieu du croulement et du desordre de traditions
confuses, une semence nouvelle Jetee au sein d'une terre encombree
de produits de toutes sortes, inutiles, pourrissent les uns sur les autres.
La jeune plante, a peine entrevue d'abord, mais cultivee avec persistance,
s'elevzi bientot au-dessus de toutes les autres, eut son allure, son port,
ses {leurs et ses fruits. Elle etouifa pour longtemps les tristes debris qui
gisaient sous son ombre.
On trouvera peut-etre etrange l'opinion que nous emettons ici sur la
formation d'un art au sein d'une classe de la societe, sans la participation
des autres, d'un art cultive par une sorte de franc-maconnerie, se deve-
loppant sans obstacles, (l'ailleurs, et conservant la vigueur de ses prin-
cipes au milieu des etablissements monastiques, qui jusqu'alors avaient
etc les maitres de l'enseignement; d'un cierge seculier qui tendait a
Fomnipotenee, d'ui1e noblesse feodale ombrageuse, et d'une plebe igno-
rante et grossiere.
Mais c'est a l'antagonisme de ces divers elements que les hommes de
principes devaient de pouvoir les developper. La France feodale se trou-
vait, au XIIe siecle, dans une situation qui n'avait point sa pareille en
Europe. Dans les autres contrees, la balance entre les pouvoirs et les
elemcnts sociaux etait moins egale; l'antagonisme ne naissait pas de
forces contraires, a Fetat de lutte permanente. lci les traditions muni-
cipales s'etaient conservees, la ffetait la feodalite pure, ailleurs la theo-
cratie, ou bien une sorte de monarchie temperee par des libertes
civiles. Dans ces Etats divers, l'art ctait un langage bien mieux compris
1 Nous faisons assez ressortir ailleurs la nouvcaute du principe de structure ätzibli par
Fevole inique frnngaise du xue siüclc. pour qu'il ne soit pas necossuire de nous ätendre
ici sur son essence. D'ailleurs ce principe se rcsume eu un seul mot : dquilibrc. (Voyez
Ancunwscrumz, CONSTRUCTION.)