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s'etait borne a etudier la forme sans trop se preoccuper du fond. On
construisait mieux, on arrivait meme a construire d'apres des methodes
nouvelles; mais le principe de structure ne se modifiait pas. L'ornemen-
tation etait plus elegaxite, les profils delicatement traces, mais cette orne-
mentation ne reposait sur aucune observation neuve, ces profils n'indi-
quaient pas nettement leur destination. Les architectes romans epuraient
leur gent, ils recherchaient le mieux, le delieat, ils raffinaient sur la
forme, mais ils ne pouvaient trouver le style, qui est la marque de Yidee
cramponnee a un principe generateur, en vue d'un resultat clairement
defini. Ce principe generateur, c'est l'emploi de la matiere en raison de
ses qualites, et en laissant apparaitre toujours le moyen, comme dans le
corps humain on distingue la charpente du squelette, l'attache des mus-
cles et le siege des organes....., la forme n'etant que la consequence de
cet emploi. Le resultat....., c'est que l'ensemble du monument, aussi
bien que chacune de ses parties, repond exactement, et sans concession
aucune, a la destination.
Aussi cet art de Yecole francaise qui se constitua vers la fin du x11" siecle,
fut-il, au milieu de la civilisation ebauchee du moyen age, de la confu-
sion des idees anciennes avec les hspirations nouvelles, comme une fan-
fare de trompettes au milieu des bourdonnements d'une foule. Chacun se
serra autour de ce noyau d'artistes et d'artisans qui avaient la puissance
d'affirmer le genie longtemps comprime d'une nation. Noblesse, cierge,
bourgeoisie, prodiguerent leurs tresors pour elever des eglises, des pa-
lais, des chateaux, des hotels, des etablissements publics, des maisons,
d'apres le nouveau principe adopte, et sempresserent de jeter bas leurs
constructions anterieures. Et il ne parait pas qu'alors personne songeait
a gener ces artistes dans les developpements de leurs principes. C'est
qu'en effet on ne gene que les artistes qui n'en possedent pas.
Un principe est une foi, et quand un principe s'appuie sur la raison,
on n'a meme pas contre lui les armes dont on peut user contre la foi
irraisonnee. Essayez donc de troubler la foi d'un geometre en la geo-
metriel
Le phenomene qui produisit notre architecture du moyen age, si for-
tement empreinte de style, est d'autant plus remarquable, que, suivant
l'ordre des choses, le style s'imprime vigoureusement dans les arts pri-
mitifs, pour s'affaiblir successivement a mesure que ces arts perfec-
tionnent Yexecution. Or, il semblerait que notre architecture laique du
X116 siecle ne peut prescnter les caracteres d'un art primitif, puisque son
point de depart est un art de decadence, l'art roman. Mais c'est la qu'il
faut se garder de confondre la forme avec le principe. Si, du roman a ce
qu'on appelle l'art gothique, il y a des transitions dans la forme, il n'y en
a pas dans le principe de structure.
inaugurant un principe de structure nouveau, le style en decoulait
suivant une loi qui ne souffre pas d'exceptions. L'art, en cela, procede
comme la nature elle-meme, le style chez elle etant le corollaire du