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compositions les plus riches, jamais les artistes du moyen äge n'ont failli
51 ce principe, qu'il s'agisse de la maeonnerie, de la charpente, de la ser-
rurerie ou de la menuiserie. On ne saurait trop etudier les assemblages
de ces grands ouvrages de menuiserie du xve siecle et du commen-
cement du XVIC, alors que les traditions gothiques n'etaient pas encore
perdues. Sous une apparence tres-compliquee, la structure est toujours
simple et conque en raison de la qualite de la matiere. Les stalles du
choeur de la cathedrale d'Amiens, par exemple, qui sont chargees d'une
quantite prodigieuse de details, presentent une structure de bois tres-
bien combinee et tres-simple. Ces stalles sont aujourd'hui au nombre de
cent seize 1; elles furent commencees en 1508 et achevees en 1522 par
deux maitres menuisiers, Alexandre Huet et Arnoult Boullin, sous la
direction de Jean Turpin, et par le tailleur cfymages Antoine Avernier.
La depense totale s'eleva a '11 230 livres 5 sols 2.
Le bois de chene employe est d'une excellente qualite, et ne laisse voir
sur aucun point la trace de piqüres de vers. Les formes hautes des extre-
mites sont couronnees de clochetons tres-eleves, ajoures, couverts de
details delicats, de figurines, tailles avec une precision et une souplesse
de ciseau remarquables. Tous les details qui couvrent les montants, les
traverses, les echarpes, les dais, les accoudoirs, les entrees et les jouees
sont merveilleux de deliezttesse, et fournissent des renseignements nom-
breux sur les vetements et le mobilier de cette epoque. Les dais, tres-
saillants, sont en forme de petites voütes d'arete et revetus de gables
d'une excessive richesse. Les grands panneaux du dorsal des stalles
hautes etaicnt autrefois couverts de fleurs de lis en relief qui ont etc
graltees a deux reprises, en 1792 et en 1831, si bien qu'on n'en distingue
plus que quelques traces.
Nous donnons (fig. 7, en A) une portion du plan de ces stalles, et en
B une coupe, qui font assez voir la largeur de cet ensemble de menui-
serie 3. La figure 8 est le trace des stalles hautes de face. En C, est la sec-
tion des montants separatifs des panneaux, et en D, Yelevation d'un de
ces montants avec l'amorce des deux echarpes formant accolade au-
dessous des voütains en arcs d'ogive. Independamment de Pexecution
merveilleuse des details, on trouve dans cet ouvrage de menuiserie une
qualite rare, c'est une observation tres-delicate de Pechelle. La grosseur
des bois qui forment la membrure est judicieusement calculee, si bien
que l'ensemble est clair et harmonieux et se dessine facilement au milieu
de ce fouillis d'ornements. Ceux-ci ne derangent pas les lignes princi-
pales, et se combinent sans elTorts avec la structure, qui d'ailleurs est
parfaitement solide et n'a fait aucun mouvement. Les branches d'arcs
1 Trente-deux en haut et vingt-six en bas de chaque cotä. Il en existait quatre de
plus avant la destruction du jubü en 1755.
2 Ccs stalles coütcraient aujourd'hui plus de 500 000 francs.
3 Les muscaux des accoudoirs donnent, en projection horizontale, la figure D.