[ SIEGE ] 38e
qui mit Yarmee des croises en peril, une bastille est elevee en face du
pont de pierre pour intercepter "toute communication des habitants avec
1a rive droite. Cet ouvrage fut fait de pierre, avec les tombes d'un cime-
tiere turc, et un fosse profond le protegea. Cinq cents hommes y furent
postes. Les gens d'Antioche ne pouvaient plus sortir que par la porte la
plus occidentale, plaeee entre le pied d'un escarpement et lc fleuve.
Tancrede etablit un second bastillon sur le coteau faisant face a cette
porte, de maniere a la commander completement. A ce sujet, Guillaume
de Tyr signale un fait curieux. Tancrede est elu par ses compagnons
pour ordonner cet ouvrage, d'un etablissement perilleux et difficile a
cause de la proximite des remparts. Mais ce chef s'excuse en arguant de
l'insuffisance de sa fortune particuliere. Le comte de Toulouse lui donne
alors cent mares d'argent, et, afin que les ouvriers employes a la con-
struction de ce fort pussent recevoir un salaire convenable, on leur alloue
quarante marcs par mois sur le tresor public. Ainsi les ouvrages de siege
etaient offerts au plus digne, par voie d'election entre les chefs. Le direc-
teur elu avait personnellement des frais a faire, probablement des acqui-
sitions de materiaux, des transports, et cette masse de pelerins qui encom-
brait Farmee, que Guillaume de Tyr appelle le peuple, n'etait que des
ouvriers auxquels on donnait un salaire. Cette armee qui traverse toute
l'Asie Mineure, suivie d'une multitude, avait avec elle ainsi des char-
pentiers, des macons, des forgerons, des corroyeurs, des tailleurs, des
armuriers, des huchiers, etc., dont on payait les services. Il n'est donc
pas surprenant que ceux parmi ces gens qui revenaient en Occident
rapportassent, apres un sejour assez long en Orient, des influences des
arts asiatiques.
Antioche ne fut prise cependant que par la trahison d'un de ses ha-
bitants.
Il n'en fut pas de meme a J erusalem; mais Yarmee des croises acque-
rait en experience, en discipline, ce qu'elle perdait en nombre.
Ce fut le 7 juin 41099 que les Occidentaux dresserent leur camp devant
la ville sainte. Ils n'etaient pas assez nombreux pour Pinvestir entibre-
ment, et se contenterent de disposer leurs quartiers du cote du nord et
du nord-ouest, depuis la porte de Saint-Etienne, qui, pres du mont
Moriah, fait face a l'est, jusquüä la porte de Jaffa, qui est percee prbs
de la tour de David; car il n'y avait pas it attaquer la place du cote de la
vallee du Cedron, tries-profonde et dominee par l'ancien revetement de
la base du temple restaure sous Herode le Grand. C'est aussi sur ce front
nord-nord-ouest que Titus avait dirige ses attaques. Peu apres Farrivee
des croises, le comte de Toulouse, qui commandait l'attaque en face de
la tour de David, porta une partie de son camp vers lc sud-ouest, au
point ou le mont Sion s'attend au nord des remparts ct oii etait elevee
Peglise de Sion. L'armee des croises occupait ainsi un peu plus de la
moitie du perimetre: de la ville; mais les assieges etaient en communi-
cation avec la campagne, par la porte de Sion, qui fait face au midi, et