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tectes charges de travaux de restauration, souvent dans des villes ou
villages ignores, depourvus de tout, ont du s'enquerir de carrieres, au
besoin en faire rouvrir d'anciennes, former des ateliers. Loin de trouver
toutes les ressources que fournissent les grands centres, ils ont du en
crecr, faeonner des ouvriers, etablir des xnethocles reguliercs, soit comme
comptabilite, soit comme conduite de chantiers. C'est ainsi que des
Inateriaux qui etaient inexploites ont etc mis dans la circulation ; que des
methodes regulieres se sont repanducs dans des departemeilts qui n'en
possedaicnt pas; que des centres d'ouvriers devenus capables ont fourni
des sujets dans un rayon etendu; que l'habitude de resoudre des diffi-
cultes de construction s'est introduite au milieu de populations sachant
a peine elever les maisons les plus simples. La centralisation administra-
tive franeaise a des merites et des avantages que nous ne lui contestons
pas, elle a cimente l'unile politique; mais il ne faut pas se dissimuler ses
iuconvenients. Pour ne parler ici que de l'architecture, la centralisation
a non-seulement fenleve aux provinces leurs ecoles, et avec elles les
procedes particuliers, les industries locales, mais les sujets capables qui
tous venaient s'absorber a Paris ou dans deux ou trois grands centres;
si bien que dans les chefs-lieux de departement, il y a trente ans, on ne
trouvait ni un architecte, ni un entrepreneur, ni un chef (l'atelier, ni un
ouvrier en etat de diriger et d'executer des travaux quelque peu impor-
tants. Il suflit, pour avoir la preuve de ce que nous disons ici, de regarder
en passant les eglises, mairies, les marches, hopitaux, etc., batis de 1815
511835, et qui sont restes debout dans les villes de province (car beaucoup
n'ont eu qu'une duree ephenlere). Les neuf dixiemes de ces edifices
(nous ne parlons pas de leur style) accusent une ignorance douloureuse
des principes les plus elementaires de la construction. La centralisation
conduisait, en fait (l'architecture, a la barbarie. Le savoir, les traditions,
les methodes, Yexecution materiellc, se retiraient peu a peu des extre-
mites. Si encore, a Paris, une ecole dirigee vers un but utile et pratique
avait pu rendre aux membres eloignes des artistes capables d'ordonner
des constructions, les ecoles provinciales n'auraient pas moins ete per-
dues, mais on aurait ainsi renvoye sur la surface du territoire des
hommes qui, comme cela se voit dans le service des ponts et chaussees,
maintiennent a un niveau egal toutes les constructions entreprises dans
les departements. Lecolc d'architecture etablie a Paris, et etablie a Paris
seulement, songeait a toute autre chose; elle formait des laureats pour
FAcademie de France a Rome, bons dessinateurs, nourris de chimeres,
mais fort peu propres a diriger un chantier en France au XIXe siecle. Ces
elus, rentres sur le sol natal apres un exil de cinq annees, pendant lequel
ils avaient releve quelques monuments antiques, n'ayant jamais ete mis
tous les ateliers formäs par les travaux de restauration, ct dans lesquels les plus ardents
dätractetlrs de ces sortes (Pcntrcpnses sont venus chercher des ouvriers et des mdthodes.
On comprendra lc motif qm nous mterdxt de fournir une piäce de cette nature.