SCULPTURE
276
lement blanc jaunätre ; tous les details, les traits du visage, les plis des
vetements, leurs bordures, sont redessines de traits noirs tres-lins et
tries-adroitement traces, afin d'accuser la forme. Le meme procede est
employe a Autun, a Moissac. Derriere les figures, les fonds sont peints en
brun rouge ou en jaune d'ocre, parfois avec un semis leger d'ornements
blancs. Cette methode ne pouvait manquer de produire un grand effet.
Rarement, dans la premiere moitie du xne siecle, trouve-t-on des statues
colorees de divers tons. Quant aux ornements, ils etaient toujours peints
de tons clairs, blancs, jaunes, rouges, vert pale, sur des fonds sombres.
C'est vers MAO que la coloration s'empare de la statuaire, que cette sta-
tuaire soit placee a Fextcrieur ou a Finterieur. Les deux statues de Notre-
Dame de Gorbeil, dont nous avons parle au commencement de cet ar-
ticle, etaient peintes de tons clairs, mais varies, les bijoux rehausses d'or.
Les statues du portail occidental de Ghartres etaient peintes de la meme
maniere. Quelquefois meme" des gaufrures de pate de chaux etaient
appliquees sur _les vetements, ainsi qu'on peut le constater encore au
portail de la cathedrale d'Angers. Ces gaufrures etaient peintes et dorees.
et figuraient des etoffes broche-es ou des passementeries. Les nus de la
statuaire, a cette epoque, sont tres-peu colores, presque blancs et redes-
sines par des traits brun-rouge.
Il va sans dire que la statuaire des monuments funeraires etait peinte
avec soin, et c'est sur ces ouvrages d'art qu'on peut encore aujour-
d'hui examiner les moyens de coloration employes. Nous avons vu les
statues des Plantagenets, a Fontevrault, entierement couvertes de leur
ancienne peinture avant le transport de ces figures au musee de Ver-
sailles.
Le XIIIe siecle ne fit que continuer cette tradition. La statuaire et
l'ornementation des portails de Notre-Dame de Paris, des cathedrales
de Senlis, d'Amiens, de Reims, des porches lateraux de Notre-Dame de
Ghartres, etaient peintes et dorees. Et de meme que la sculpture, la colo-
ration penchait vers le naturalisme. Toutefois cette peinture ne consis-
tait pas seulement en des tons poses a plat sur les vetements et les nus :
l'art intervenait. Dans les plis enfonces, dans les parties qui sont oppo-
sees a la lumiere, ou qui pouvaient accrocher des reflets trop brillants,
on reconnait l'apposition de glacis obscurs. Des redessines vigoureux en
noir ou en brun donnent du relief au modele, de la vie aux nus. Ainsi,
dans les fonds des plis de robes bleu clair, le peintre a pose un glacis
roux; d'autres fois a-t-on fait valoir des tons jaune pur, dans la lumiere.
par des glacis froids obtenus par du noir. Les artistes qui ont fait les
admirables vitraux des xne et XIIIe siecles avaient une connaissance
trop parfaite de l'harmonie des couleurs pour ne pas appliquer cette
connaissance a la coloration de la sculpture. Et, a vrai dire, cela n'est
point aussi facile qu'on le pourrait croire tout d'abord. Les tentatives
en ce genre qu'on a faites de notre temps prouvent que la difflculte en
pareil cas est grande, au contraire, quand on veut conserver a la sculp-