t RESTAURATION ] 18
des edilices gothiques ifinspiraient que la tristesse (cela est aise a croire
dans l'etat ou on les avait mis). Les fleches percees a jour se cletachant
dans la brume provoquaient des periodes romantiques; on decrivait les
zlevrelles de pierre, les cloclzctons dresses sur les contre-forts, les älägantf-s
colonnettes groupees pour soutenir des voütcs a dvfrayantes hauteurs.
(les temoins de la picfte (d'autres disaient le fanatisme) de nos päres ne
reiletaient qu'une sorte (Yetat moitie mystique, moitie barbare, dans
lequel le caprice regnait en maitre. Inutile de nous etendre ici sur ce
galimatias banal qui faisait rage en 1825, et qu'on ne retrouve plus que
dans les feuilletons de journaux attardes. Quoi qu'il en soit, ces phrases
creuses, le Musee des monuments franeais aidant, quelques collections,
comme celle de du Sommerard, firent que plusieurs artistes se prirent 51
examiner curieusement ces debris des sieeles d'ignorance et (le barbarie
Cet examen, quelque peu superficiel et timide (l'abord, ne provoquait
pas moins d'assez vertes remontrances. On se cachait pour dessiner ces
monuments elevfes par les Goths, comme disaient quelques graves
personnages. Ce fut alors que des hommes qui, n'etant point artistes,
se trouvaient ainsi hors de portee de la ferule acacleinitjtie, ouvrirent la
campagne par des travaux fort remarquables pour le temps ou ils furent
faits.
En 1830, M. Vitet fut nomme inspecteur general des nmuiimeiits
historiques. Cet ecrivain delicat sut apporter dans ces nouvelles fonc-
tions, non de grandes connaissances archeologiques que personne alors
ne pouvait posseder, mais un esprit de critique et d'analyse qui fit
penetrer tout d'abord la lumiere dans l'histoire de nos anciens monu-
ments. En 1831, M. Vitet adressa au ministre de l'inter-leur un rapport
lucide, methodique, sur l'inspection a laquelle il s'etait livre dans les
departements du Nord, qui devoila tout a coup aux esprits eclaires des
tresors jusqu'alors ignores, rapport considere aujourd'hui comme un
chef-d'muvre en ce genre d'etudes., Nous demanderons la permission
d'en citer quelques extraits : a Je sais, dit l'auteur, qu'aux yeux de bien
(c des gens qui font autorite, c'est un singulier paradoxe que de parler
a scrieusement de la sculpture du moyen age. Ales en croire, depuis
u les Antonins jusqu'a Francois l", il n'a pas ete question de sculpture
a en Europe, et les statuaires n'ont ete que des macons incultes et
a grossiers. Il suffit pourtant d'avoir des yeux et un peu de bonne foi,
a pour faire justice de ce prejuge, pour recounaltre qu'au sortir des
a siecles de pure barbarie, il s'est elevc dans le moyen fige une grande
1805), sa visite si l'abbaye de Saint-Denis. On voit poindre dans ce chapitre l'admiration
romantique ou romanesque pour les vieux edifices. a En partant de ce lien souterrain,
a dit l'auteur, nous remontämes dans l'enceinte solitaire, ou lc temps commence main-
a tenant 41 promener sn faux. Le vieillard (car il y a toujours un vieillard dans les
a ruines) se flatte de voir un jour restaurer cette abbaye; il l'onde cet espoir sur quel-
a ques mots echappes ä Bonaparte. Mais comme ces reparations seraient extränlcmcnt
a conteuses, il ne faut pas y penser pour le moment..."