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S C ULPTU RE
tions, ses deductions, ses a-peu-pres, sont bien loin de la realite; il se
passionne pour son modele, il lui trouve chaque jour des aspects nou-
veaux, des qualites charmantes qui lui echappziient. Alors la traduction
devient de plus en plus litterale. De createur (createur de seconde main)
il devient copiste; il est subjuge par la Divinite qui Pinspirait a mesure
qu'il la connait mieux, et ne pense plus qu'a la montrer telle qu'il la voit.
C'est l'heure du naturalisme, he11re qui a sonne pour la Grece et pour
nos ecoles du X1112 siecle.
Mais dans ce naturalisme de la sculpture, l'art ifentre-t-il pour rien? Si
fait : la composition, l'agencement de ces charmants modeles recueillis
dans les champs, comptent pour quelque chose, et en cela nos artistes,
le naturalisme admis, sont encore des maitres.
Pour la statuaire, il se manifeste un besoin de formules; on n'admet
plus alors, il est vrai, le mode hieratique, traditionnel, mais on sent la
necessite, quand l'art penetre partout, exige un grand nombre de mains,
d'etablir des methocles pratiques qui permettent d'eviter de grossieres
erreurs. Bienientendu, les ehefs-dkeuvre, ou plutot ceux qui ont assez
de genie pour en produire, se preoccupent mediocrement de ces regles.
llllais c'est precisement en s'appuyant sur ces ceuvrcs des maitres qu'on
formule des regles pour le commun des artistes. Dans l'album de Villard
de l-lonnecourt, qui date du milieu du XIIIC siecle, on voit apparaitre
l'emploi de ces procedes mecanirlues propres a faciliter la conlposition
et le dessin des figures, et meme des ornements. ll y a toute raison de
croire que ces methodes, fort anciennes d'ailleurs, puisqu'on en trouve
l'application dans les arts du dessin de FEgypte, ne furent jamais per-
dues, et avaient etc transmises en Occident par Fecole d'Alexandrie, par
les peintres grecs de Byzance. Leur apparition dans le recueil de croquis
de Villard de Honnecourt n'en est pas moins un fait d'un grand interet,
parce qu'elle semble indiquer une application libre de formules qui,
jusqu'au commencement du X1110 siecle, avaient un caractere hieratique.
Nous avons dit comme les imagiers du moyen age avaient su observer
et rendre le geste dans les compositions des ligures. Si grossiere parfois
que soit Fuauvre, le geste n'est jamais faux. Or, les croquis de Villard
nous donnent la clef des formules adoptees pour arriver a ce resultat.
La geometrie, d'apres ces croquis, est le generateur des mouvements du
corps humain, des animaux; elle sert a etablir certaines proportions
relatives des figures; lui-meme le dit et fournit quelques exemples pris
en courant 1. Du temps de Villard, donc, les imagiers possedaient ces
methodes pratiques qui, si elles ne peuvent inspirer l'artiste de genie,
1 a Ci commence li force des trais de portraiture si con li ars de ionldtrio les en-
K Saigne Pop legierelnent ovrer... n Ici commfznce la mäthndc du tract-E pour dessiner
la figure ainsi que l'enseigne l'art de la gäometrie pour facilement travailler. (Voyez
FAIbum de Villard de Honnecourt, publid en fac-simile, par J. B. Lassus et Darccl,
pl. 3h, 35, 36 et 37.)
VIII. 3h