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point couler de grandes pieces de bronze 1. Sans vouloir en rien diminuer
le merite de ces industriels, nous ne pouvons admettre qu'ils aient
retrouve les procedes de fonte; ils n'ont fait qu'adopter, pour toute fonte,
un mode rarement employe : et cela s'explique par la nature meme des
objets d'art qu'on leur demandait. Il s'agissait de fondre des statues
dhpres l'antique. Il est evident que le procede de cire perdue ne pouvait
etre alors employe. Il fallait battre des piäces sur un moulage ou sur
l'original, faire un noyau, rassembler avec grand soin les pieces autour
du noyau, et couler du bronze dans l'intervalle reste libre. Ce procede,
si interessant et precieux qu'il soit, eut un inconvenient, il deshabitua
les statuaires de faire des cires perdues; ceux-ci se contenteront des lors
de faeonner un modele en terre que l'on moule en platre; sur ce platre
les pieces sont battues, et 1.'on coule, en menageant un noyau au centre
de toutes ces pieces rassemblees. Mais comme il est tres-diflicile, sinon
impossible, de battre des pieces sur une statue entiere et de les rassembler
exactement, on coupe les statues en plusieurs morceaux et l'on fond
separement chaque piece; puis on rassemble ces pieces par des tenons,
des goupilles et des rivets. Or, jamais, par ce procede, le bronze ne
conserve cet ensemble, cette unite d'aspect des pieces fondues d'un seul
jet. Puis, comme les coutures, les bourrelets reserves pour l'assemblage
se multiplient, il faut passer sur tout cela la lime, le burin, contenter
les parties faibles; si bien que la statue fondue ne reproduit qu'assez
imparfaitement le modele du maitre. Nous ne voyons pas trop ce que
l'art a gagne a cela, si ce n'est de permettre au premier modeleur venu
de faire faire un bronze par un fondeur.
Mais quand il faut que l'artiste qui veut couler une statue en bronze
fasse lui-meme le noyau de terre de sa figure, car ce noyau est la
partie essentielle, veille a ce que ce noyau, faeonne en argile et paille
hachee, soit bien seche; quand, apres cela, il faut revetir cette grande
maquette d'une couche de cire dont Yepaisseur doit etre exactement
calculee; modeler cette cire pour obtenir les finesses de la forme; puis,
enfin, apres avoir manage des events et des jets, faire recouvrir tout cela
d'une epaisse couche de terre preparee expres, la bien envelopper et
cercler; chauffer l'ensemble pour que la cire s'echappe en fondant; et
eniin, apres avoir combine le melange de ses metaux et avoir fait faire
un fourneau, couler la matiere en fusion dans le vide qu'oceupait la
cire : certes, alors, il y a 1a tout un labeur penible, chanceux, une suite
de calculs et de combinaisons, une idee arretee des le commencement
l Il en est de cette singulibre prdtention comme de beaucoup d'autres du mäme temps.
On repete partout, par exemple, que la brouette a eue inventec sous Louis XlV ; or, il est
vingt manuscrits du xm" et du xive sibclc dont les vignettes prescntent des brouettes
beüuwup moins grossieres que celles du xvlf sieclc. Le haquct est, dit-on encore, invente
par Pascal; l'invention ne lui ferait pas grand honneur, mais elle ne lui appartient pas.
On voit des haquets üguräs des le XlVc siecle.