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SCULPTURE
Fornementation sculptee n'estpas traitee de la meme maniere a l'air
libre ou sous les foute-s et planchers d'une salle. Heurtee a Fexterieur,
profitant de la lumiere directe du soleil, elle procede par plans nettement
accuses; tandis qu'a Finterieur, en tenant compte de la lumiere diffuse,
elle adopte un modele plus doux, elle evite les trop fortes saillies. De
meme cette ornementation se modifie-t-elle en raison de la nature des
materiaux mis en oeuvre. Les artistes du xnre siecle ne cherchent pas a
obtenir, dans Yornementation sculptee sur du gres dur ou du granit,
les refouillements que permet le calcaire; ils donnent alors aux details
plus de largeur, ils accusent un modele plus simple, se rapprochant de
Yebauche. S'ils disposent, au contraire, de pierres a grain fin et serre,
Fornementation arrive a des details tres-delicats, a des refouillements
prononces, sans cependant nuire aux dispositions des masses. Ce parti
est bien franchement suivi dans les sculptures de la facade occidentale
de Notre-Dame de Paris, ou, sur une sculpture large et produisant un
puissant effet a distance, on decouvre des delicatesses de modele extraor-
dinaires.
Du jour oii l'ecole laique s'emparait de la flore pour composer ses
ornements sculptes, elle devait peu a peu se rapprocher de la realite.
lnterpretes d'abord, les vegetaux sont bientot imites. A quelques annees
de distance, le progres vers l'imitation reelle est sensible. Cette marche
d'un art qui suitun developpement logique est accompagnee d'ensei-
gnements precieux. Uornementation primitive de l'e'cole laique pendant
les dernieres annees du x11" siecle, d'une execution si parfaite, d'un
style si delicat, se maintenant entre les exigences monumentales et l'ob-
servation de la nature, se prete difficilement, a cause de la delicatesse
meme des principes admis, a la grande sculpture decorative. Placee pres
de l'oeil, charmante sur des chapiteaux, sur des jambages ou des tympans
de portes, elle perd une grande partie de sa valeur au sommet des edi-
fices, Augmcntant les dimensions des monuments au commencement du
X1110 sieele, les artistes prennent, pour leurs profils, pour leurs ornements,
une echelle plus grande. C'est alors qu'on voit s'epanouir la flore sculp-
turale, et c'est encore par l'observation de la nature que les sculpteurs
arrivent a satisfaire a ces exigences d'echelle. Car il est a remarquer que
pour faire grand -nous disons grand, et non point gros- en ornemen-
tation sculptee, c'est a la nature seulement qu'on peut recourir. Toute
ornementation de convention, comme est la plus grande partie de la
sculpture romaine et de la sculpture romane, ne peut etre grandie im-
punement. En augmentant Fechelle, on tombe alors dans la lourdeur,
dans le difforme. Nos artistes modernes ont le sentiment de cette du];
culte; aussi Fornementation pseudo-romaine qu'ils adoptent habituelle-
nent n'est jamais grande (Yechelle, et les sculptures plaeees a A0 mimes
du sol reproduisent le parti, le modele et Fechelle des ornements qui
decorent des soubassements.
En recourant a la flore, les maitres d'autrefois se laissaient la ressource,
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