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SCULPTURE
11101208, M. le comte Melchior de Vogüe, reconnaissant combien notre
art du X110 siecle se rapproche de cet art greco-romain de Syrie, termine-
t-il par ce passage : a Tandis qu'en Occident le sentiment de l'art s'etei-
a gnait peu a peu, sous la rude etreinte des barbares, en Orient, en
u Syrie du moins, il existait une ecole intelligente qui maintenait les
u bonnes traditions et les rajeunissait par d'l1eureuses innovations. Dans
u quelles limites s'exerca l'influence de cette ecole ? Dans quelle mesure
u ses enseignements ou ses exemples contribuerent-ils a la renaissance
u occidentale du x19 sieele? Quelle part enlin l'0rient byzantin eut-il
a dans la formation de notre art franglais du moyen age a
M. le comte Melchior de Vogüe nous fournit une partie des pieces
necessaires a la solution de ces questions, en ce qui touche a l'architec-
ture et a la sculpture. Celle-ci ne se compose que d'une ornementation
toujours adroitement composee, mais seche et plate; la figure humaine
et les animaux font absolument defaut, sauf deux ou trois exemples, un
agneau, des paons, tres-naivement traites. Ce sont presque toujours des
feuilles dentelees, decoupees vivement, cannelees dans les pleins, de
maniere a obtenir une suite d'ombres et de clairs sans modele. Du IVe au
Vle siecle, ce genre d'ornementation varie a peine. A cette ornementation
empruntee a une flore toute de convention se melent parfois surtout
dans les edifices les plus eloignes de la chute du paganisme des com-
binaisons geometriques, des entrelacs obtenus par des penetrations de
cercles ou de lignes droites suivant certains angles. En examinant ces
jolis monuments, si habilement entendus comme structure, concus si
sagement en vue du besoin et de l'emploi des materiaux, toujours d'une
heureuse proportion, qui presentent un si grand nombre de dispositions
originales, on est surpris de trouver dans l'ornementation cette seche-
resse, ce defaut d'imagination, cette pauvrete de ressources. Les eglises,
couvents, villas, bains, maisons, qui temoignent d'un etat de civilisation
tires-parfait, presentent a peu pres la meme ornementation pendant
l'espace de trois siecles, et cette ornementation ne s'eleve pas au-dessus
du metier. Elle n'est qu'un poncif trace sur la pierre, enfonce de quelques
millimetres dans les intervalles des feuilles ou brindilles, des fruits ou
rosettes, et uniformement modeles a l'aide de ce coup de ciseau en creux
vif. D'ailleurs, les anciennes sculptures de Yeglise Sainte-Sophie pre-
Sentent le meme faire, avec un peu plus de recherche dans les details.
Les artistes occidentaux, ä dater des premieres croisades, s'inspirent
evidemment de cet art. Nous avons fait ressortir, a Yaftiflle PHÜFIL, 00H1-
lnent ils copient les moulures, mais ils ne se hornent pas a cet emprunt :
ils prennent aussi des procedes de structure, des dispositions de details
et cette ornementation seche et decoupee. (les Occidentaux cependant
ne sont pas tous pourvus des memes goüts, des memes aptitudes. Ce sont
des Provencaux, des Languedociens, des Poitevins, des Bourguignons,
des Normands, des Auvergnats, des Berrichons. En allant i; Pägole d'art
de la Syrie, ils voient ces monuments a travers des traditions fort appau-
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