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plus romantiques qu'on ne le veut croire. Il suffit, pour s'en convaincre,
(l'aller visiter le Musee Britannique, mieux fourni de productions de la
statuaire grecque que le Musee du Louvre. Ce qui ressort de cet examen,
c'est Fextreme liberte des artistes. Les fragments du "tombeau de Mausole,
par exemple, qui certes datent d'un bon temps et qui sont tries-beaux,
ressemblent plus a de la statuaire de Reims qu'a celle du Parthenon.
Nous en sommes desole pour les classiques qui se sont fait un petit art
grec commode pour leur usage particulier et celui de leurs proselytes :
c'est d'un deplorable exemple, mais c'est grec et bien grec; et ce mo-
nument etait fort prise par les Grecs, puisqu'il fut considere comme la
septieme merveille des arts. Pouvons-nous admettre que les Grecs ne
S'y connaissaient pas ?
La statue du roi de Carie est presque entierement conservee, compris
la tete; et tout le personnage rappelle singulierement une des statues
(lll portail de Iteims que nous donnons ici (fig. 18), en engageant les
sculpteurs a aller la voir. C'est la premiere sur Pebrasement de gauche
(le la porte centrale. Or, (Iuand ensonge que cette statue du roi Mausole
est posterieure de soixante ans a la statuaire de Phidias, on peut assurer
que les statuaires grecs ne se reeopiaient pas et qu'ils cherchaient le
neuf sur toutes les voies, sans craindre d'aller sans cesse recourir a la
nature comme a la source vivifiante. Au Musce Britannique on peut voir
d'assez nombreux exemples de cette statuaire grecque des cotes de FAsie
Mineure, qui, bien qu'empreinte d'un style excellent, dilfere autant que
la statuaire du moyen fige elle-meme de la statuaire de FAttique. Si
les musees en France etaient des etablissements serieusement affectes
il Fetude et places en dehors des systemes exclusifs, n'aurait-on pas dejät
du reunir, dans des salles speciales, des moulages de la statuaire antique
et du moyen age comparees. Rien ne serait plus propre a ouvrir l'intel-
ligence des artistes et a leur montrer comment l'art, a toutes les epoques,
procede toujours d'apres certains principes identiques. Cela ne vaudrait-
il pas mieux et ne serait-il pas plus liberal que de repaitre notre jeu-
nesse de banalites, et d'entretenir au milieu d'elle une ignorance qui, si
les choses continuent ainsi, nous fera honte en Europe 1 ? Si dans des
salles on plaeait parallelement des figures grecques de Fepoque egine-
tique et des figures du x1? siecle de la statuaire francaise, on serait
frappe des analogies de ces deux arts, non-seulement quant a la forme,
mais quant au faire. Si plus loin on mettait en regard des figures de
Fepoque du developpement grec et du X1116 siecle francais, on verrait
par quels points de contact nombreux se reunissent ces deux arts, si
1 11 y a däjä plus de dix ans, notre belle statuaire des xne et xme sibclcs a äträ mouläe
pour äLre envoyäe en Angleterre, et former des musäes comparatifs du plus grand img-
rät, 51 tous les points de vue. A la mämc Gpoque, nous avons offert d'envoyer, sans frais
de moulage, des äpreuvcs de ces modbles pouv en former ä Paris un musäe de statuaire
comparäe. Il n'a pas dtä rdpondu 51 cette offre.
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