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ces provinces etaient en rapport par Limoges avec les Venitiens, et rece-
vaient des lors un grand nombre d'objets venus d'0rient. En Bourgogne,
dans le Lyonnais, l'ecole clunisienne produisait seule des (BLIVPGS d'une
valeur originale, et comme statuaire, et comme ornementation, par les
motifs deduits plus haut. Dans Plle-de-France la statuaire n'avait nulle
valeur, et Fornementatien, comme celle de la Normandie, s'inspirait des
compositions byzantines, a cause de la grande quantite (Petoffes d'Orient
qui penetraient dans ces provinces par le commerce des Venitiens et des
Genois. En Poitou, la statuaire etait egalement tombee dans la plus
grossiere barbarie, et Yornementaticn, lourde, etait un melan ge de tradi-
tions gallo-romaines et d'influences byzantines fournies par les etolfes et
les ustensiles d'Orient.
Si l'on consulte la carte que nous avons dressee pour accompagner
l'article GLocnEn (fig. 6), on se rendra compte d'une partie de ces divi-
sions d'ecoles, bien que les arts de la sculpture n'aient pas exactement
les memes foyers que ceux de l'architecture. Ainsi, il y a une ecole d'ar-
chitecture normande au commencement du x12 siecle, et il n'y a pas, a
proprement parler, d'ecole de sculpture normande. L'ecole de sculpture
de Flle-de-France ne commence a rayonner que vers la lin de la pre-
miere moitie du X112 siecle. Si l'influence de l'architecture rhenane se
fait sentir au commencement du X116 siecle jusqu'a Ghalons-sur-Marne,
la sculpture des bords du Rhin ne penetre pas si loin-vers l'ouest. Tou-
louse, qui n'a pas, a la lin du x19 siccle, une ecole d'architecture locale,
possede dejit une puissante ecole de sculpture. L'architecture, deve-
loppec au x10 siecle dans les provinces occidentales, ne montre des
ecoles de sculpture dignes de ce nom qu'au X118 siecle. On peut donc
compter vers 1100, en France, cinq ecoles de statuaire: la plus ancienne,
Fecole rhenane; l'ecole de Toulouse, Fecole de Limoges, l'ecole proven-
cale, et la derniere nee, l'e'cole clunisienne. Or, cette derniere allait
promptement en former de nouvelles sur la surface du territoire, et
renouveler entierement la plupart de celles qui lui etaient anterieures,
en les poussant en dehors de la voie hieratique, a la recherche du vrai,
vers l'etude de la nature. Constatons d'abord que partout ou resident les
clunisiens au commencement du x11" siecle, la sculpture acquiert une
superiorite marquee, soit comme ornementation, soit comme statuaire.
Le temoignage d'un contemporain, celui de saint Bernard, qui s'eleva
si vivement contre ces ecoles de sculptures clunisiennes et qui essaya de
combattre leur influence, serait une preuve de l'importance qu'elles
avaient acquise au XIIÜ siecle, si les monuments n'etaient pas la.
L'eeole clunisienne etait la seule en elfet qui pouvait se developper,
parce qu'en prenant pour point de depart, pour enseignement, dirons-
nous, l'art byzantin, elle observait la nature, tendait a s'eloigner ainsi
des types consacres, a se soustraire peu a peu a Yhieratisme des arts
grecs des bas temps, et qu'elle avait su prendre, dans ces arts, comme
modele, celui qui avait conserve les allures les plus libres, la peinture.