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tation sculptee d'un beau style, et qui rappelle celui des meilleurs temps
de la Grece antique 1, mais sont absolument depourvus de statuaire.
Cependant il avait existe a Constantinople, avant et apres les fureurs des
iconoelastes, des ecoles de sculpteurs statuaires, qui fabriquaient quan-
tite de meubles en bois, en ivoire,en orfevrerie, que les Veniticns et les
Genois repandaient en Occident. Nous possedons, dans nos musees et
nos bibliotheques, bon nombre de ces objets anterieurs au xue siecle. Il
ne parait pas toutefois que les artistes byzantins se livrasscnt a la grande
statuaire, et les exemples dont nous parlons ici sont, a tout prendre, de
petite dimension et d'une execution souvent barbare. Il n'en etait pas de
meme pour la peinture : les Byzantins avaient produit dans cet art des
muvres tout a fait remarquables, et dont nous pouvons nous faire une
idee par les peintures des eglises de la Grece2 et par les vignettes des
manuscrits de la Bibliotheque imperiale.
Or, parmi ces croises partis des differents points de Pextreme Occident,
les uns rapportent, des le commencement du XIIB siecle, de nombreux
motifs de sculpture d'ornement d'un beau caractere, d'autres de l'orne-
mentation et de la statuaire.
Nous voyons, par exemple, a cette epoque, le Poitou, la Saintonge, la
Normandie, Ylle-de-France, la Picardie, FAuVergne, repandre sur leurs
edifices, des rinceaux, des chapiteaux, des frises d'ornements d'un tres-
beau style, d'une bonne execution, qui semblent copies, ou du moins
immediatement inspires par Fornementation byzantine de la Syrie, tandis
qu'a cote de ces ornements, la statuaire demeure Et l'etat barbare et ne
semble pas faire un progres sensible. Mais si nous nous transportons en
Bourgogne, sur les bords de la Saone, dans le voisinage des principaux
monasteres clunisiens, c'est tout autre chose. La statuaire a fait, au com-
mencement du xna siecle, un progres aussi rapide que Yornementation
sculptee, et rappelle moins encore par son style les diptyques byzantins,
que les peintures qui ornent les monuments et les manuscrits grecs.
Ceci s'explique. Si des moines grossiers, si des ouvriers ignorants pou-
vaient reproduire les ornements grecs qui abondent sur les edifices de
la S_vrie septentrionale, ils ne pouvaient copier des statues ou bas-reliefs
a sujets, qui niexistaient pas. Ils quant a la decoration
sculptec, et restaient gaulois quant a la statuaire. Pour transposer dans
les arts, il faut un certain degre d'instruction, de savoir, que les cluni-
siens seuls alors possedaient. Les clunisiens ürent donc chez eux une
renaissance de la statuaire, a l'aide de la peinture grecque. Cela est sen-
sible pour quiconque est familier avec cet art. Si nous nous transpor-
tons, par exemple, devant le tympan de la grande porte de Feglise abba-
1 Voyez l'ouvrage de M. lc comte Melchior de Vogüd et de M. Duthoit, sur les villes
entre Alep ct Antiochc (Syrie centrale).
2 M. Paul Durand a calquä un grand nombre de ces peintures qui datent des vme,
x2 ct x10 sibclcs, et qui sont du plus beau style. ll serait fort 51 ddsirer que ces calques
fussent publiäs.