SCULPTURE
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vulgaire, il nous reste des fragments nombreux. Laissant de cote l'inte-
ret archeologique qui s'attache a ces debris, consideres comme oeuvres
(l'art, ils ne causent qu'un ennui et un degoüt profonds. Nulle appa-
rence dündividualite, d'originalite ; les auteurs de ces oeuvres monotones
travaillenta la tache pour gagner leur salaire. Reproduisant des modeles
deja copies, ne recourant jamais a la source vivifiante de la nature, trai-
nant partout, de Marseille a Goutances, de Lyon a Bordeaux, leurs poncifs,
'ils couvrent la Gaule romanisee de monuments tous revetus de la meme
ornementation banale, des memes bas-reliefs mous et grossiers (l'excen-
tien, comme ces joueurs d'orgues de nos jours qui vont porter les airs
(Foperas jusque dans nos plus petits villages.
La sculpture dans les Gaules, au moment des grandes invasions, c'est-
a-dire au Iv" siecle, n'etait plus un art, c'e'tait un metier, sabatardissant
chaque jour. Au point de vue de Fexecution seule, rien n'est plus plat,
plus vulgaire, plus ncglige. Mais comme composition, comme invention,
on trouve encore dans ces fragments une sorte de liberte, ctoriginalite
qui n'existe plus dans les tristes monuments eleves en ltatlic depuis
laisse POFCCF quelque chose qui lui est particulier dans cette sculpture
chargee, banale, sans caractere, et s'affranchit parfois du classicisme
romain en pleine decadence. Ainsi, pour exemple, il ne s'astreint pas
a des reproductions identiques d'un meme modele pour les chapiteaux
d'un ordre dependant d'un edifice. Les füts des colonnes se couvrent
d'ornements varies. Les types admis par les ordres se modifient; il y a
comme une tentative d'affranchissement. Ce n'est pas ici l'occasion de
nous etendre sur la valeur de ces symptomes qui, au total, n'est pas
considerablc, mais cependant nous devons les signaler, parce qu'ils font
connaitre que la Gaule ne restait pas absolument sous l'influence etroite
de la tradition des arts romains. Des fragments existant Z1 Autun, au
Mont-Dore, a Auxerre, a Lyon, a Reims, a Dijon, dans le Soissonnais,
et qui datent des 1110, Iv" et v8 siecles, indiquent ces tendances originales.
Voici un de ces fragments, entre autres, un chapiteau (fig. l) provenant
du portique de cloture du temple de Champlieu, pres de Compiegne,
qui presente une disposition particuliere et qu'on ne retrouverait pas
dans les edifices italiens de la meme epoque (me siecle). Or, les autres
chapiteaux appartenant au meme portique ne sont pas tailles sur le
meme modele. Cette variete, dans un temps oü la sculpture n'etait qu'un
travail d'ouvriers assez grossiers, est remarquable. Elle permettrait de
supposer que ces Gaulois remanises des derniers temps etaient fatigues
de ces reproductions abatardies des memes types, et qu'ils cherchaient
21 les abandonner.
Cette tendance, en admettant qu'elle fut generale sur le sol des
Gaules, se perdit dans le flot des invasions. L'art de la sculpture
yeteint sous les conquerants du Nord, et si, dans les rares ediüces qui
nous restent de Fepoque merovingienne, on rencontre cit et la quelques