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Mais ces Grecs des bas temps n'ont pas, dans la Syrie centrale, fait des
voütes d'arete sur de grandes dimensions. Ils n'ont accepte, de Yheritage
romain, que l'arc, le berceau et la coupole. Cependant ils se sont appro-
pries ces formes en y ajoutant leurs dispositions rationnelles, et ces ten-
dances sont assez marquees pour que les Occidentaux, qui virent ces
monuments a la fin du x10 siecle, aient pu suivre cette voie, mais en
allant beaucoup plus loin que n'avaient pu le faire les habitants de ces
petites cites semees sur le chemin de la Perse a Byzance.
Or, on peut le demander a tous les gens de bonne foi : admettre le
principe de la structure des voütes romaines, et s'inspirer de l'esprit
analytique du Grec, de son goüt pour le vrai, de son sentiment inne de
la forme, pour, de ces elements, constituer un systeme complet, n'est-ce
pas un progres? Et est-on en droit de repousser comme suranne ce sys-
teme, si d'ailleurs on ne sait que reproduire la forme apparente de la
structure romaine, sans yprendre meule ce qui en constitue le merite
principal, Yeconomie des moyens et la simplicite d'execution? ll suffit,
pensons-nous, de poser ces questions, pour que chacun puisse deter-
miner ou s'est arrete le progres et oü commence la decadence.
Adopter la voüte romaine, mais raisonner ainsi que l'ont fait ces
artistes occidentaux du X110 siecle, est, a nos yeux, une des revolutions
les plus completes, les mieux justifiees qui aient jamais ete faites dans
le domaine de l'architecture. Que se sont-ils dit ces artistes? a En con-
struisant leurs voütes, les Romains ont considere deux objets, une ossa-
ture et un remplissage neutre; mais de ces deux objets distincts ils n'ont
deduit qu'une forme apparente, une concretion, confondant ainsi la
chose qui soutient, la chose essentielle et la chose soutenue, inerte. Si
l'intention est excellente, si le resultat materiel est satisfaisant, le resul-
tat, comme art, est vicieux; car, dans l'art de l'architecture, qui est une
sorte de creation, la fonction reelle de chaque membre doit etre accusee
par une forme en rapport avec cette fonction. Si une voüte fne peut se
soutenir que par un reseau de nerfs, ce reseau n'est pas destine par l'art
a etre cache, il doit etre apparent, d'autant plus apparent, qu'il est plus
utile. Les Grecs ont admis cette loi, sans souffrir d'exceptions..." n Que
les architectes occidentaux aient fait ce raisonnement en plein x11" siecle,
nous ne Yaflirmerons pas; mais leurs monuments le font pour eux, et
cela nous suffit.
Les architectes romans avaient adopte tout d'abord la voüte en ber-
ceau comme etant la plus simple et la plus facile a construire. Deja, vers
la fin du x10 siecle, ils avaient nerve ces berceaux, non plus par des arcs
plus resistants, comme nature de materiaux, noyes dans Fepaisseur
meme de la voüte, mais par des arcs-douhleaux saillants 1 donnant une
plus grande resistance a ces berceaux au droit des points d'appui. La
poussee continue de ce genre de voütes les fit bientot abandonner. Res-
1 Voyez Cousmucnos, fig. 3.