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encore de sa petite main droite et tient une sphere ou un livre dans sa
main gauche, mais qui, plus tard, passe son bras droit derriere 1e cou
de sa merc et joue avec un oiseau. Alors le visage de la mere sourit
et se tourne parfois vers la tete de l'enfant. C'est la mere par excellence,
la femme revctue d'un caractere divin, et c'est bien s elle, en effet, que
la foule s'adresse; c'est elle qu'elle implore, c'est en son intervention
toute-puissante qu'elle croit, et l'enfant n'est plus dans ses bras que pour
marquer l'origine de cette puissance.
Bien entendu, nous ne pretendons ici, en aucune facon," discuter la
question dogmatique; nous ne faisons que rendre compte des transfor-
mations qui furent la consequence de l'intention laique dans la reprä-
sentation de cette partie de l'iconographie saeree. Le mouvement des
esprits religieux vers le culte de la Vierge acquit, pendant le X1116 siecle,
une importance telle, que parfois le haut clerge s'en emut ; mais il
n'etait pas possible d'aller a l'encontre. On ne s'adressait plus, dans ses
prieres, qu'a la Vierge, parce qu'elle etait, aux yeux des tideles, l'inter-
mediaire toujours compatissant, toujours indulgent et toujours (iggnn;
entre le pecheur et la justice divine. On concoit combien ce sentiment
fut, pour les artistes et les poetes, une ifläpllisäble Source de sujets. Cela
convenait d'ailleurs a l'esprit fraucais, qui n'aime pas les doctrines
absolues, qui veut des palliatifs a la loi, et qui croit volontiers qu'avec
de l'esprit, un heureux tour, un bon sentiment, on peut tout se faire
pardonner.
Pour le peuple, la Vierge redevenue femme, avec ses clans, son insis-
tance, sa passion active, sa tendresse de ca-zur, trouvait toujours le
moyen de vous tirer des plus mauves cas, pour peu qu'on Pimplorat
avec ferveurl. Dans les legendeS des IHIPHCIBS dus ä la Vierge, si nom-
breuses au xme siecle, parfois PCfätiHlfeS, S011Vent pueriles, ily a toujours
un cote gaulois. C'est avec une digmte douce et fine que la Vierge sait
faire tomber le diable dans ses propres pieges. Les artistes, particulie-
rement, semblent posseder le privilege d'exercer l'indulgente sollicitude
de la mere du Christ; musiciens, POÜÜÜS, PÜiHtFGS et sculpteurs lui rendent-
ils aussi a l'envi un hommage auquel, en sa qualite de femme, elle ne
saurait demeurer insensible.
Toujours presente la ou son intervention peut sauver une ame ou pre-
venir un danger; exigeant peu, afin de trouver plus souvent l'occasion
de faire eclater son inepuisable charite ; ses conseils, quand parfois elle
en donne, sont simples et ne s'appuient jamais sur les recriminations ou
les menaces. Telle est la Vierge que nous montrent les legendes, les
poesies, et dont les sculpteurs et les peintres ont essaye de retracer
l'image. C'est 1a, on en conviendra, une des plus touchantes creations
du moyen äge et qui en eclaire les plus sombres pages.
Viäfge:
1 Voyez la lägende de Thäophile (Rutebeuf). Voyez le Livre des miracles de la
manuscrits de la bibliolhieque du säminaire de Soissons.