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loi generale (Yunite, et que, des lors, nous aurions cette pretention de
prescrire l'emploi de cette forme.
Pour etre pl.us clair, ayons recours a une comparaison que chacun
peut saisir. Il y a, dans la nature inorganique que nous avons sous les
yeux, une quantite innombrable de cristaux qui sont la consequence
d'une loi de la cristallisation. Reproduire l'apparence plastique de ces
cristaux en n'importe quelle matiere, ou etablir des conditions phy-
siques ou chimiques a Yaidedesquellcs ces cristaux peuvent se former
dbux-memes sous l'empire de la loi generale, sont deux operations
tres-distinctes. La premiere est purement mecanique et ne donne qu'un
resultat sans portee; la seconde met un attribut de la creation au
service de l'intelligence humaine. La question est donc ainsi reduite
a sa plus saisissante expression : copier en une matiere quelconque des
cristaux qui sont le produit d'une loi regissant la cristallisation; ou
chercher la loi, afin qu'en Yappliquant, il en resulte naturellement les
cristaux propres a la maticre employee. Pour trouver cette loi, il faut
necessairement delinir les qualites de ces cristaux, analyser leur sub-
stance et les conditions sous lesquelles ils prennent la forme que nous
leur connaissons. Et serait-on bien venu, dans le domaine de la science,
de dire a un chimiste qui cherche la loi de la cristallisation, qu'il pre-
tend nous faire vivre dans une geode ?
Malheureusement, ce qu'on ne se permettraitpas dans le domaine de
la science, on se le permet, sans scrupules, dans le domaine de l'ar_
chitecture, par suite de Yobscurite que l'on s'est complu depuis long-
temps a jeter sur Yetude de cet art et ses principes. L'architecture n'est
pas une sorte d'initiation mysterieuse; elle est soumise, comme tous
les produits de l'intelligence, a des principes qui ont leur siege dans
la raison humaine. Or, la raison n'est pas multiple, elle est une. Il n'y a
pas deux manieres d'avoir raison devant une question posee. Mais
la question changeant, la conclusion, donnee par la raison, se modifie.
Si donc Funite doit exister dans l'art de l'architecture, ce ne peut etre
en appliquant telle ou telle forme, mais en cherchant la forme qui
est l'expression de ce que prescrit la raison. La raison seule peut etablir
le lieu entre les parties, mettre chaque chose asa place, et donner a
Fceuvre non-seulement la eohesion, maisFapparence de la cohesion, par
la succession vraie des operations qui la doivent constituer. Si large
qu'on veuille faire la part a l'imagination, elle n'a, pour constituer une
iforme, que la voie tracee par la raison. Les genies n'ont pas procede
autrement, et leurs ouvrages ne nous charment que parce qu'ils s'em-
parent de notre esprit ou de notre coeur, en passant par le chemin de
notre raison.
Nos monuments du moyen age possedent par excellence Funite:
l" parce qu'ils remplissent exactement, scrupuleusement, servilement,
les programmes donnes, et qu'ils. sont ainsi la plus vive expression de 1a
civilisation au sein de laquelle ils ont ete construits; 2" parce que leur
"N IX.