MAISON
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rieurs eclaires sur un jardin. Le troisieme etage est divise par une
cloison et forme deux pieces. On sent encore, dans cette habitation,
l'influence de la petite forteresse privee; cfetait la un reste de ces tra-
ditions des municipalites meridionales si fort eprouvees pendant les
guerres des Albigeois 1. Prenons encore dans le Nord une maison un peu
plus recente, de 1240 51 1250 environ; cherchons une des plus grandes et
des plus riches de cette epoque;allons 51 Reims et examinons la maison
dite des Musiciens, situee dans la rue du Tambour. Cette maison, dont
le rez-de-chaussee est fort mutile, a conserve intact son premier etage
sur la voie publique. Au-dessus seleviait le toit, avec des mansardes
dont on ne trouve plus que des traces sous le comble moderne.
La facade de cette maison possede quatre fenetres hautes et larges
au premier otage, avec cinq niches dans les trumeaux. Ces niches sont
decorees de figures de musiciens assis, plus grandes que nature : le
premier musicien, en commeneant parla gauche, joue du tambour et
d'une sorte de clarinette; le secondjoue de la cornemuse; le troisieme
(celui du milieu) tenait un faucon sur le poing; le quatrieme joue de
la harpe et le cinquieme du violon: ce dernier est coiffe d'un chapel
de fleurs. Voici (fig. '11) une travee de cette facade. Des boutiques du
rez-de-chaussee indiquees dans notre figure, il ne reste que les petits
arcs et un des pieds-droits. Une large porte cochere s'ouvre vers l'ex-
tremite opposee et donnait dans une cour autrefois entouree de bati-
ments de la meme epoque, mais dont on ne trouve que des fragments.
Le batiment sur la rue est simple en epaisseur, et etait, laarait-il, di-
vise en deux salles a peu pres egales. L'escalier tenait aux batiments
de la cour.
Cette maison appartenait peut-etre a la confrerie des menetriers
de Pteims, qui au X1110 sieele jouissait d'une certaine reputation non-
seulement en Champagne, mais dans tout le Nord. Comme on peut en
juger par l'examen de notre figure, la construction est simple, l'orne-
mentation riche. Les figures sont du meilleur style champenois "l.
Les provinces avaient pour leurs batiments prives des ecoles d'art
differentes comme pour leurs eglises et leurs etablissements publics;
une maison de la Bourgogne, au XIIIÜ siecle, ne ressemblait pas a une
' Voyez dans l'ouvrage de MM. Verdier et Cattois, llfirchileciiire civile et domestique,
quelques maisons des provinces meridionales, notamment Cttliü du Veneur, ä Cordes. On
voit, sur la fagade de la maison Caussade donnee ici, des anneaux scolles aux jambages
des fcnetres pour porter les perches et les bannes, preservntives du soleil.
' Plusieurs fois dejä il a eus question de demolir cette belle maison, le plus intercssant
des eililloes civils de Reims. En attendant cette Llemolition, l'un des proprietnires (car la
fagade appartient ä deux particuliers) a le soin (le faire peindre in l'huile tous les deux ou
trois ans sa fueude, compris les statues. Si cette maison doit etrc ilemolie, il serait bien
il souhaiter que la illgade put fztro roplacee ä llcims mC-me; certes, le sacrifice minium
que lu ville {imposerait alors serait bien largement compense par Pinterili, que presente
la conservation de cette oeuvre d'art.