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etaient latins par tradition), ils exercaient une influence sur les con-
structeurs charges d'elever leurs habitations, et, malgre Pantipathie
qui existait entre les castes des conquerants venus dbutre-Rhin et les
vieux Gaulois devenus latins, il semblerait qu'au contact de ces races
plus pures, le Gallo-Romain se rappelät son origine, reprit peu a peu
les goüts natifs, reagissant contre l'inlluence si longtemps subie des
arts romains et que, dans ses habitations, il se plut a composer un
art qui füt a lui. Aussi, au XIIE siecle deja, les maisons des citadins ne
ressemblent nullement aux batiments d'habitation des mouasteres;
C'est un autre art, ce sont d'autres methodes de construire. L'archi-
tecture civile se forme avec Fetablissement des communes; elle prend
une allure independante comme le chateau feodal, qui, de son cote,
seloigne de plus en plus de la villa romaine, aux traditions de laquelle
les abbayes seules restent tideles. ll est toujours interessant de voir
Comment, chez les populations livrees aleurs instincts, les arts, et l'ar-
chitecture en particulier, reiletent les tendances des esprits.
Au xue siecle, l'architecture monastique, arrivee a son apogee, ne
progresse plus. Saint Bernard essaye de lui rendre la signification
qu'elle perd chaque jour, en lui imposant la simplicite comme pre-
miere condition; mais, apres lui, cet art puritain, qu'il a pretendu
donner comme type des etablissements religieux, est entraine dans
le torrent commun. L'architecture militaire feodale et l'architecture
domestique au contraire se developpent avec une prodigieuse aetivite;
les vieux restes des arts romains sont decidement mis de cote, et les
bourgeois, comme les seigneurs, veulent avoir un art flexible qui se
prete a toutes les exigences des habitudes changeantes d'une societe.
Des que le pouvoir des etahlissements religieux s'ali'aiblit, l'esprit mu-
nicipal et politique se revele, et le siecle n'est pas encore acheve, que
tous les travaux d'art et (l'industrie sont entre les mains de ces gens de
ville qui, cinquante ans plus tot, devaient tous demander aux couvents
depuis le plan du palais jusqu'aux serrures des portes.
Il serait du plus haut interetdeposseder encore aujourd'hui quelques-
Llncs de ces Inaisons du x12 siecle, (fest-a-dire de Pepoque ou les tradi-
tions gallo-romaiues, encore assez entieres, et gauloises primitives, se
melangeaient si etrangement avec les formes d'architecture importees
Par les peuples du nord de la Germanie et par les Normands. Nous
n'avons sur ces temps que les documents tics-imparfaits donnes par
les manuscrits; ils nous permettent toutefois de constater la presence
de ces ouvrages de bois qui n'ont guere d'analogie qu'avec quelques
anciennes charpenteries d11 Danemark, du Tyrol et de la Suisse 1.
L'aspect de la maison de ville francaise de la ün du x1" siecle et du
' Il faut. dire toutefois que lk-Slämcnt. slave a modiüä profondäment ces constrllCf-IOÜÜ
dans le Tyrol; cependant on y reconnait encore la trace de ces charpentes mdü-germa"
niques caractfärisäes dans les monuments nxanuscrits,