103
IIÜTEL-DIEU
les fous, pour les vieillards indigents, pour les femmes en couches,
Les confreries voulurent aussi avoir leurs maisons de refuge, leurs hos-
pices; et enfin, pendant les pestes qui desolerent les villes du moyen
äge, des eveques, des seigneurs laiques, preterent des locaux depen-
dants de leurs residences pour soigner les malades, et voulurent souvent
eux-memeslcs assister. A cote des desordres de toute nature et des abus
sans nombre qui signalerent cette epoquc, il faut donc reconnaitre que
tous, petits et grands, (fherchaient a adoucir le sort des classes souf-
frantes par les moyens les plus efficaces, et que l'esprit de charite
ne fut jamais plus actif que dans ces temps. Il faut dire que, souvent,
tel seigneur qui fondait un hospice en mourant avait, sa vie durant,
fait plus de malheureux qu'on n'en pouvait secourir de longtemps dans
la maison elevee par lui. Le moyen age est ainsi fait: c'est un melange
sans mesure de bien et de mal; aussi y a-t-il autant d'injustice a pre-
senter cette epoque comme un temps de miseres continuelles que
comme un age de foi vive, de eharite et de sagesse. Partout, a cote
d'un mal, d'un abus monstrueux, on trouve le sentiment du droit, le
respect pour l'homme, pour ses malheurs et ses faiblesses. Le mot de
frette-mite n'est pas seulement dans les discours, il trouve partout une
application pratique, et si la passion ou linteret font trop souvent en-
freindre cette loi sacree, du moins son principe n'est jamais meconnu.
Par le fait, nos grandes institutions de charite nous viennent du moyen
äge et lui survivent; il est bon de ne pas trop l'oublier: ayant profite
de la belle partie de Fheritage, peut-etre serait-il juste d'etre indulgents
pour son cote miserable.
On comprendra que parmi tant d'edifices eleves sous l'inspiration
d'une charite vive et voulant immediatement porter remede au mal,
beaucoup n'etaient que des bicoques, des maisons que l'on appropriait
tant bien que mal au service des pauvres et des malades; car nombre
(le ces hospices se composaient d'une maison donnee par un simple
bourgeois, avec une rente a prendre sur son bien. Peu a peu ces ino-
destes donations setendaient, s'enrichissaient par les quetes, et deve-
naient des etablissements importants. Cependant il nous reste encore
quelques hopitaux du moyen age, qui, au point de vue de l'art, sont
remarquables. Bien hätis, bien acres, spacieux, ils ont aussi cet zivan-
tage, sur les constructions analogues que nous elevons aujourd'hui
generalernent, de laisser a l'art une large place, de ne point attrister
les malades par cet aspect froid et desole qui caracterise de notre temps
(sauf de rares exceptions) les ediiices publics de charite 1.
Parmi les hopitaux les plus anciens qui existent encore en France,
' Il faut rcconnaitre que depuis peu on a fait chez nous de grands progräs en ce genre.
Ifhospicc de Charcnton, ceux de Vincennes et du Väsinet, l'asile d'ali6n6s de 'l'oulouse,
Sont non-seulement parfaitement appropriäs ä leur destination; mais ce sont aussi, comme
oeuvres d'architecture, des ädiüceä faits pour donner aux malades des idües PÜÜÜ"
Hgrcäahles que tristes.
, Tja.