[ ENGIN ] 224
Des machines analogues a celle-ci servaient aussi Z1 lancer des traits ;
mais nous y reviendrons bientot en parlant des grandes arhaletes ä tour.
Nous allons continuer la revue des engins propres a jeter des pierres
ou autres projectiles en bombe.
Villard de Honnecourt 1 nous donne le plan d'un de ces grands
trebuchets ä contre-poids si fort employes pendant les guerres des
xne et Xllle siecles. Quoique Yelevation de cet engin manque dans le nia-
nuscrit de notre architecte picard du X111" siecle, cependant la figure
qu'il presente et l'explication qu'il y jointjettent une vive lumiere sur
ces sortes de machines. Villard ecrit au bas de son plan la legende sui-
vantef : a Se vus voles faire le fort engieng con apielc trebucet prendes
u ci gard. Ves ent ci les soles si com il siet sorterreNes ladevant les .ij.
u windas3 et le corde ploie a coi ou ravale la vergfLVeir le poes en cele
f Voyez l'Albu1n de Villard de Honnecourt, publie par MM. Lassus et Alfred Darcel
(Paris, Delion, edit. 1858), et Pedition anglaise publiee par M. Willis (Oxford, Parker).
2 lt Si vous voulez faconner le fort engin qu'on appelle trebuchet, faites ici attention. En
a voici les sablieres comme elles reposent a terre. Voici devant les deux treuils ct la corde
u double avec laquelle on ravale la verge. Voir le pouvez en cette autre page. Il y a grand
il faix a ravaler, car ce contre-poids est tres-pesant; car il se compose d'une huche pleine
K( de terre qui a deux grandes toises de long, sur neuf pieds de large et douze pieds de
u profondeur. Et au decocher de la ileche (de la cheville), pensez! et vous en donnez
u garde, car elle doit etre maintenue ä cette traverse du devant. n
a un. Lassus et Darcel ont traduit tuindas par ressort. Wfindas ou guindas sont em-
ployes, en vieux francais picard, comme cabestan et comme treuil, comme cylindre autour
duquel s'enroule une corde. Perrault, dans sa traduction du chapitre : De balistarum
Htliüllftbltä" (Vitruve, lib. X, cap. XYI), se sert du mot vimlas dans le sens de treuil et non
de cabestan; aujourddnli on dit encore une guinde, en langage de machiniste de theatre,
pour designer une cordellc s'enroulent sur un cylindre horizontal ou treuil; d'on guiiuler,
qui veut dire, en style de machiniste, appuyer sur le treuil, dest-a-dire le faire tourner
de maniere fi enrouler la corde soutenant un fardeau. Diego Veano, dans la Vraie instruc-
tion de l'artillerie (Francfort, 1615, p. 122, fig. donne un cric qu'il nomme martinet
en francais, ioinde en ilamand ; puis une chevre s. soulever les pieces, qu'il appelle guindal.
Windas n'etait donc pas, comme le croit M. Willis, un cabestan, dhpres 1'autorite de
Lnhire et de Felibien, autorites trop recentes pour etre de quelque poids en ces matieres.
M. Willis, dans Pedition anglaise de Villard de Honnecourt, releve avec raison l'erreur
commise par les commentateurs frangais; mais il en conclut, ä. tort suivant nous, que les
windas sont de petits cabestans fixes sur les deux branches anterieures du plan de Villard,
branches qui sont evidemment des ressorts que M. Willis gratifie, dans la gravure jointe
zfi son commentaire, d'assemblages omis par Villard; au contraire, notre auteur a le soin
de faire voir que les deux branches doubles sont chacune d'un seul morceau, qu'elles
sont faites au moyen de fourches naturelles. D'ailleurs les deux treuils horizontaux, win.
(las, mentionne-s et traces par Villard, rendent la fonction des cabestans inutile, et une
corde s'enroulent autour d'un cabestan ne saurait prealablement faire le tour d'un treuil
horizontal, car alors le cabestan ne pourrait fonctionner a cause de la resistance de frot-
tement qubifrirait le cfiblo enroule sur le treuil. M. Willis aurait du supposer des poulies
et non des treuils; mais le dessin de Villard n'indique des poulies qu'a Pextremite des
ressorts. L'es commentateurs francais de Villard de Honnecourt ont donc, nous semble-t-il,
compris la fonction des deux ressorts independante de celle des deux treuils horizon-