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bres de l'ordre. Cependant les Grecs ont ete pourvus de sens si delicats,
qu'on ne saurait guere admettre chez eux la non-application d'un prin-
cipe vrai en matiere d'art, sans une cause majeure. Nous connaissons
mal le mecanisme harmonique de l'architecture grecque : nous ne pou-
vons que constater ses resultats sans avoir decouvert,jusqu'a present,
ses formules generales. Nous reconnaissons bien qu'il existe un module,
des tonalitäs diüerentes, des regles mathematiques, mais nous n'en pos-
sedons pas la clef, et Vitruve ne peut guere nous aider en ceci, car lui-
meme ne semble pas avoir ete initie aux formules de l'architecture
grecque des beaux temps, etce qu'il dit au sujet des ordres n'est pas tou-
jours (l'accord avec les exemples laisses par les maitres. Laissons donc
ce probleme aresoudre, ne voyons que l'apparence. Si nous considerons
seulement les deux architectures meres des arts du moyen age, c'est-a-
dire l'architecture grecque et l'architecture romaine, nous trouvons dans
la premiere un art complet, tout d'une piece, consequent, formule, dans
lequel l'apparence est d'accord avec le principe; dans la seconde, une
structure independante souvent de l'apparence, le besoin et l'art,
l'objet et sa deeoration. Le besoin etant manifeste dans l'architecture
POITIZIlDB, etant imperieux meme habituellement, et le besoin se rap-
portant a l'homme, l'harmonie pure de l'art grec est detruite : Fechelle
apparait deja dans les editices romains; elle devient iinperieuse dans
l'architecture du moyen age. De meme que, dans la societe antique,
l'individu n'est rien, qu'il est le jouet du destin, qu'il est perdu dans
la chose publique, aussi ne peut-il exercer une influence sur la forme
ou les proportions des monuments qu'il eleve. Un temple est un
temple; il est grand, si la cite peut le faire grand; il est petit, si sa des-
tination ou la penurie des ressources exige qu'il soit petit; s'il est
grand, il y a une grande porte; s'il est petit, il n'a qu'une petite porte.
Les impossibilites resultant de la nature des materiaux mettent seules
une limite aux dimensions du grand monument, comme l'obligation
de passer sous une porte empoche seule qu'elle ne s'abaisse au-dessous
de la taille humaine; mais il ne venait certainement pas a l'esprit d'un
Grec de mettre en rapport son editice avec lui homme, comme il ne
supposait pas que son moi put modifier les arrets du destin. Les rap-
ports harmoniques qui existent entre les membres d'un ordre grec,
sont si bien commandes par l'art et non par l'objet, que, par exemple,
un portique de colonnes doriques devant toujours s'elever sur un socle
compose d'assises en retraite les unes sur les autres comme des (legres,
la hauteur de ces degres devant etre dans un rapport harmonique avec
le diametre des colonnes, si le diametre de ces colonnes est tel que
chacun des degres ait la hauteur d'une marche ordinaire, c'est "tant
mieux pour les jambes de ceux qui veulent entrer sous le portique.
Mais si le diametre de ces colonnes est beaucoup plus grand, la hau-
teur harmonique des degres augmentera en proportion; il deviendra
impossible a des jambes humaines de les franchir, et comme, apres
tout, il faut monter, on pratiquera, dans ces (legres des marches