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CRUCIFIX
sommet de la porte du jube, s'elevait a un grand crucifix qui, avec sa
a croix, netoit que d'une piece, et, ajoute-t-il, le pied d'iceluy est fait
K en arcade d'une autre seule piece, qui sont deux chefs-d'oeuvre de
ff taille et de sculpture. n
a Dans les temps primitifs, dit M. Didron 1, on voit la croix, mais sans
a le divin crucifie. Vers le vie siecle, on parle d'un crucifix execute a
(r Narbonne ; mais c'est un fait etrange et qui est signale pour sa nou-
(f veaute. Au x9 siecle, quelques crucifix apparaissent ca et la; mais le
u (zrucifie s'y montre avec une physionomie douce et bienveillante; il
u est d'ailleurs vetu d'une longue robe a manches, laquelle ne laisse
u voir le nu qu'aux extremites des bras et des jambes? Aux Xle et
a xne siecles, la robe s'ecourte, les manches disparaissent, et deja la
(f poitrine est decouverte quelquefois, parce que la robe n'est qu'une
a espece (le tunique3. Au xin? siecle, la tunique est aussi courte que
(f possible; au xiv", ce n'est plus qu'un morceau dkätoffe ou meme de
u toile qu'on roule autour des reins, et c'est ainsi que jusque nosjours
u Jesus en croix a constamment ete repräsentä- En 11151116 lelnps QU'ON
(4 atttriste la figure du crucifie et qu'on grave les souffrances physiques
a sur son corps divin, en meme temps aussi. on le depouille de sa robe
c et du petit vetement qui le protegeaienhn. n En effet, le crucifix du
niusee de Gluny est couvert. d'un courtjupon a petits plis; sa tete n'in-
dique pas la souffrance physique, mais plutot la bienveillance; ses yeux
sont (iuverls; sa coiffure n'est pas en desordre, et il ne parait pas
qu'une couronne depines ait aie posee sur son chef. Les crucifix pri-
mitifs, comme ceux de Saint-Sernin et d'Amiens, ont la tete couverte
d'une couronne royale. Au xnc siecle, Jesus en croix est habituellement.
tete nue, et ce n'est qu'a dater du xme qu'on voit la couronne d'epines
ceindre son front penche vers la terre. Cependant la tendance vers
le ifealisme se fait deja sentir a la fin du xue siecle. Il existe dans la sa-
crisfie de la cathedrale de Bordeaux un crucifix d'une grande valeur
comme muvre d'art; il appartient a la seconde moitie du xne siecle. On
voit que l'artiste a cherche l'imitation de la nature, et le divin supplicie
est un homme souffrant. La tete (fig. l) conserve toutefois un calme et
une grandeur d'expression qui meritent l'attention des artistes. Trois
clous seulement attachent les membres du Christ, tandis qu'avant cette
epoque les clous sont au nombre de quatre. Les crucifix poses sur les
jubes sont ordinairement accompagnes de la Vierge et de saint Jean.
La Yierge est placee a la droite du Sauveur, saint Jean a sa gauche.
Quelquefois un ange, au pied de la croix, recoit le sang du Christ dans
un calice. Dans les peintures et les vitraux, sur les retables des autels,
on voit souvent, a la droite du Christ, FEgIise qui reeoit le sang divin
f Iconographie chrälienoze, histoire de Dieu, p. 241. Paris, 1843.
a Le cruciüx de Saint-Sernin de Toulouse, celui d Amiens.
' Plutüt un jupon.