CORPORATION
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traditions romaines dans les grandes cites mericlionales, et les corpo-
rations ne cesserent d'exister; tandis que dans les villes du Nord on
ne les voit guere setablir qu'au moment de l'affranchissement, des
communes, dest-a-dire vers le xne siecle. Les rois les prirent sous leur
protection, comme un des moyens propres a affaiblir la puissance
fcodale. Sous saint Louis, elles furent rcglementees a Paris par Etienne
Boileauf. Pour (levenir membre d'une corporation, a cette epoque, il
fallait faire un apprentissage qui durait plus ou moins longtemps, et
a l'expiration duquel on devenait maitre. Les maitres exercaient une
sorte de controle les uns sur les autres, maintenaient par consequent
le prix de la main-d'oeuvre et la bonne qualite des produits. Il ne s'agis-
sait pas alors de libre concurrence, et les marchands ou les industriels
des villes ne pouvaient resister a la tyrannie des seigneurs qu'en s'unis-'4
saut elroitement sous le patronage du suzeraiti. Ils formaient ainsi desx-l
corps puissants avec lesquels il fallait compter, et qui, par leur orga-
nisation meme, assuraient au suzerain certains revenus regulierement
percus. Les maitriscs s'obtinrent souvent a prix (l'argent, ce qui consti-
tuaitune ressource pour le tresor; ou bien encore le roi, moyennantun
capital une fois paye, autorisait des corporations qui acqueraient ainsi
le droit de percevoir certains impots sur les entrees des marchandises,
des peages sur les rivieres, sur les ponts, a Fentree des ports, etc.
Pour ne pas sortir de notre sujet, les corps de metiers attaches aux
hatiments se composaient, au X1112 siecle, des charpentiers, des macons,
des tailleurs de pierre, des platriers et mortelliers, des irnagiers, des
peintres et tailleurs d'images (sculpteurs), des faiseurs de ponts. Quant
aux maitres des ceuvres, a ce que nous appelons aujourd'hui des archi-
tectes, ils ne paraissentpzls avoir jamais forme un corps; nous ne pou-
vons avoir meme qu'une idee assez vague de la nature de leurs attribu-
tions jusqu'au xve siecle. Nous voyons qu'on les appelait dans les villes
pour halir des editiccs, et qu'on leur accordait des honoraires fixes pen-
(lant la (luree du travail (voy. ARCHITECTE); mais presidaient-ils aux mar-
ches passes avec les divers chefs d'ouvriers? etablissaient-ils des devis?
reglaient-ils les comptes? Tout cela parait douteux. Des la fin du xlnt
siecle, onv oit des villes, des abhes ou des chapitres, passer des marches
avec les maitres des divers corps d'etats sans l'intervention de l'archi-
tecte. Celui-ci semble conserver une position independante et n'en-
courir aucune responsabilite; c'est un artiste, en un mot, qui fait exe-
cuter son oeuvre par des ouvriers n'ayant avec lui d'autres rapports
que ceux de fournisseurs ou de tacherons vis-a-vis d'un intendant
gencral. Le systeme de regie n'etait, pas habituellement employe; les
ouvriers de chaque metier travaillaient a leurs pieces; l'architecte dis-
tribuait la besogne, et un piqueur relevait probablement le travail de
f Voyez les Räglenzerlts sur les arts et onätiers de Paris rdfligäs au xm" siäcle
rzefzers, cYEtiennc Boilcau (Goll. de docum. mea. sur Flzist. de France).
Livre des