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intercssant aujourd'hui pour nous: c'est la methode simple suivie par
l'architecte et ses subordonnes pour elever une construction fort com-
pliquee en apparence, et qui semblerait. devoir exiger une quantite
fabuleuse dbperations et de traces. En realite, les difticultes d'appareil
n'existent pas; Cette construction n'est qu'un zisselnblage de plans ver-
ticaux dont les rabattements n'exigent qu'un seul trace chacun. Il faut
admettre, bien entendu, avant toute chose, que l'architecte sait. ce qu'il
veut, qu'il voit son editice sous tous ses aspects zivant de commencer
les fondations; qu'il s'est rendu compte des (ÜVGPSBS parties de sa con-
struction; qu'il a fait, avant la taille de la premiere pierre, le travail
que nous faisons sur un edifice que nous mesurons et examinons dans
ses (IEPPIIÄBPS details.L'architecture gothique est. exigeante a ce point, et
c'est peut-titre ce qui lui attire le plus d'ennemis. Il est si consolant de
dire, lorsque se presente une difficulte sur le tas : u Nous verrons cela
au ravalement. vll est si penible, lorsque tout n'est pas prevu d'avance,
d'entendre, chaque jour, une longue serie de questions presentees par
Yappareilleur ou le conducteur; questions auxquelles il faut repondre
clairement, simplement, en homme qui sait ce qu'il va dire, comme s'il
eüt prevu ce qu'on aurait a lui demander! Donc, l'architecte du choeur
de Saint-Nazairez de Garcassonne a fait non-seulement le plan de son
editice, non-seulement des elevations et des coupes; mais il sait d'a-
vance le point exact des naissances des divers arcs, de leur rencontre,
de leur penetration: il a trace leurs profils et sait sur quoi ils doivent
porter; il connait les resultats des poussees, leur direction, leur puis-
sauce; il a calcule les charges, il a reduit les forces et les resistances a
leurs plusjustes limites. Il sait tout cela d'avance, il faut qu'il le sache
des la premiere assise au-dessus de terre. Sa conception etant ainsi en-
tiere, tixee sur son papier et dans son cerveau, ses subordonnes mar-
chent en aveugles. Il dit a l'un : a Voici le dessin de la pile A qui se
repete deux fois; voici le dessin du contre-fort G qui se repete dix
fois, etc..; voici le trace de la fenetre A qui se repete six fois, celui de la
fenetreB qui se repete sept fois; voici une branche d'arc ogive avec ses
sommiers, darc-douhleau avec ses sommiers, etc. v Ceci dit, l'archi-
tecte peut s'en aller et laisser tailler toutes les assises et morceaux de
chacun de ces membres. Les tailles finies, survient un maitre poseur,
qui, sans erreur possible, fait monter et assembler toutes ces (liverses
pieces prenant forcement leur place chacune, comme les pieces d'une
machine bien concue. Cette facon de proceder explique comment, a
cette epoque (a la tin du xm" siecle et au XIVe), des architectes franeais
faisaient. executer des monuments dans des contrees ou peut-etre ils
n'avaient jamais mis les pieds ; comment on demandait d'Espagne, du
midi de la France, de Hongrie, de Boheme, des projets de monuments
a ces architectes, et comment ces monuments pouvaient s'e'lever et rap-
peler exactement, Sauf dans quelques details de profils et de sculpture,
les edifices batis entre la Somme et la Loire. Le choeur de Feglise
jäaintfbtazaire de Gareassonne fut probablement erige ainsi, a l'aide de