[ DEVELOPPEMENTS ] 165 [ CONSTRUCTION ]
cipes les plus simples chez des artistes procedant toujours par le raison-
nement.
Cependant, voici qui nous prouve qu'il ne faut jamais se presser de
porter un jugement sur un art qu'a peine nous commencons a dechif-
frer. Entrons dans les collateraux de la cathedrale, doubles dans la nef
comme autour du choeur; mais remarquons, en passant, que cette nef
fut batie quinze on vingt ans apres le choeur, et que les architectes du
commencement du x1110 siecle qui l'ont elevee proütaient des fautes
commises par leurs predecesseurs. Nous observons que les piliers qui
separent les doubles collateraux de la nef ne sont passemblalxles entre
eux; de deux en deux, nous voyons alternativement une colonne mono-
eylindrique composee de tambours de pierre, et une colonne centrale
egalement composee de tambours, mais ilanquee de dix colonnettes
en delit d'un seul morceau chacune (voyez le plan fig. 92). Pourquoi
cette difference de construction Est-ce caprice, fantaisie? Mais
pour peu qu'on ait etudie ces monuments, on demeure convaincu que
le caprice n'entre pour rien dans les combinaisons des constructeurs
de cette epoque, surtout s'il s'agit d'un membre d'architecture aussi
important que l'est un pilier 1. La question: a Pourquoi cette diffe-
rence ? etant posee, avec quelque attention nous la resoudrons
bientot. (les piliers intermediaires A, entoures de colonnettes en delil,
sont au droit des colonnes de la grande nef qui recoivent la charge la
plus forte, dest-a-dire un arc-doubleau et deux arcs ogives. Or, il faut
savoir que, primitivement, les arcs-houtants de la nef n'etaient pas ceux
que nous voyons aujourd'hui, qui ne datent que de la seconde moitie
du Xllle siecle. Ces arcs-boutants primitifs etaient a double volee, c'est-
a-dire qu'ils venaient d'abord se reposer sur un pilier intermediaire
pose surles piles AB du double collateral, et qu'ils etaient contre-butes
a leur tour par des arcs-boutants secondaires franchissant les espaces
AC, BD (voy. au mot ÜATIIEDIIALE, lalfig. 2 donnant la coupe de la nefde
Notre-Dame de Paris). Certainement les arcs-boutants destines a contre-
buter Farrivee des xarcs-doubleaux et arcs ogives des grandes voütes
etaient plus puissants que ceux destines seulement a contre-buter un
simple arc-douhleau a peine charge. Peut-titre meme Farc-doubleau
intermediaire des grandes voütes n'etait-il pas contre-bute par un arc-
boutant, ce qui n'eut pas empechc les voütes de conserver leur cour-
bure, puisque, dans les deux bras de la croisee, nous voyons encore des
zircs-doubleaux simples, ainsi abandonnes a eux-memes, qui ne se sont
pas deformes. Les explications precerlentes contenues dans cet article
ont fait voir que le pilier vertical portant les voütes ne joue qu'un role
secondaire, et qu'une grande partie du poids des voütes soutiree par
1 Le caprice est une de ces explications admises dans bien des cas, lorsqu'on parle de l'ar-
chitecture gothique; elle a cet avantage de rassurer la conscience des personnes qui aiment
mieux trancher d'un mot une question difficile que de tenter de Fetudier