CHATEAU
74
Ki bien le porreient desfendrc
Ke Reis ne Quens ne porrcit prendre
Apres une tentative infructueuse du roi de France pour faire lever le
blocus, 1e comte Guillaume fut oblige de capituler, faute de vivres :
Willame dkkrches lungement
Garda la terre e tint forment,
E plus lungement la tenist,
Se viande ne li fausist ;
Maiz pur viande ki failli,
T'en-c e chastel e tur gucrpi;
Al Duc Willame tut rcndi,
Et al Roi de France s'enfuix v
Il n'est guere possible, en effet, avec les moyens d'attaque dont on
disposait alors, de prendre un chäteau aussi bien defendu par la nature
et par des travaux d'art admirables.
Nous donnons (fig. 5) une vue cavaliere du chäteau d'Arques tel qu'il
devait etre au x16 sieole, prise en dehors de la porte de Dieppe, et en
supprimant les defenses posterieures ajoutees de ce cote. On com-
prendra ainsi plus facilement les dispositions interieures de cette
place forte.
Deja, du temps de Guillaume le Bätard, les barons normands con-
struisaient donc de vastes chäteaux de magonnerie possedant tout ce
qui constitue les places de ce genre au moyen fige : fosses profonds et
habilement creuses, enceintes inferieures et superieures, donjon, etc,
Le duc de Normandie, pendant les longues luttes du commencement
de son rogne, eleva des chateaux, ou tout au moins des donjons, pour
tenir en bride les villes qui avaient pris parti contre lui :
a E il Iist cax e pierre atrairc,
a Hoec (au Mans) üst une tur faire f.
Apres la descente en Angleterre, Petablissement des chateaux fut
un des moyens que Guillaume le Gonquerant employa pour assurer sa
nouvelle POYMÜÜ, et Ce fut, en grande partie, a ces forteresses elevees
sur des points strategiques ou dans les villes memes qu'il dut de pou-
voir se maintenir au milieu d'un pays qui tentait chaquejour des sou-
levements pour chasser Fetranger et reconquerir son independance.
Mais beaucoup de seigneurs, du moment que la guerre generale etuit
terminee, tenant ces chateaux en fief, se prenaient de querelle avec
leurs voisins, faisaient des excursions sur les terres les uns des autres,
et en venaient a s'attaquer dans leurs places fortes. Ou bien, menon-
tents de voir la faveur du suzerain tomber sur d'autres que sur eux,
1 Rob. Wacc, Roman de Hou, vers 8600 et suiv
' Ibid, vers 10211.