CUATISAU
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a en nantissement. Cette espece d'usure politique parut naturelle dans
a le temps ou elle eut lieu; les envahissements de saint Louis etaient.
a couverts parla droiture de ses intentions : personne n'eut ose le soup-
e conner d'une chose injuste. Il semblait, par l'empire de ses vertus,
a consacrer jusqu'aux dernieres consequences de sa politiquel.
Saint Louis, au moyen de ces expeditions outre-mer, non-seulement
ruinait la feoflalite, l'enlevait a ses chateaux, mais (zentralisail. encore
sous son commandement une nombreuse armee, qu'a son retour, et
maigre ses desastres, il sut employer a agrandir le (lomaine royal,
sous un pretexte religieux. De meme que, sous le pretexte de se pre-
munir contre les menaces du Vieux de la Montagne, il etablit une garde
particuliere autour de sa personne, qui a jour et nuit estoit en cure
a diligente de son corps bien garder 2 n, mais qui, par le fait, etait
destinee a prevenii" les periidies des seigneurs.
Joinville rapporte qu'en partant pour la croisade et pour se mettre
en etat, il engagea a ses amis une grande partie de son (lomaine,
a tant. qu'il ne lui demeura point plus hault de douze cens livres
e de terre de rente v. Arrive en Ghypre, il ne lui restait plus d'ar-
gent vaillant que deux cents livres tournois d'or et d'argent lors-
qu'il eut paye son passage et celui de ses chevaliers. Saint Louis,
l'ayant su, l'envoya querir et lui donna huit cents livres tournois pour
continuerFexpedition. Au moment de partir pour la seconde croisade :
a Je fu mout pressez dou roy de France etdou roy de Navarre, dit Join_
a ville, de inoy croisier. A ce respondi-je que tandis comme je avoie
a estei ou servise Dieu et le roy outre-mer, et puis que je en reving,
u [i serjavzs au roy de France et le roy rle Navarre nfavoient destruite ma
a gent et apovroiez; Si que il ne serait janzais heure que je et il n'en
a vlwSiSSWLf (Valussenl) Pil 3. v Certes il y a tout lieu de croire que
Joinville etait un bon seigneur et qu'il disait vrai; mais combien
d'autres, en se croisant. et laissant leurs sujets gouvernes par les officiers
du roi, leur permettaient ainsi de passer d'un regime insupportable
sous un gouvernement moins "ÜWICZISSMI" en ce qu'il etait moins local et.
partait de plus haut? Les seigneurs feodaux possedaient Fautorite judi-
ciaire sur leurs terres; les baillis royaux, charges par Philippe-Auguste
de recevoir tous les mois aux assises les plaintes des sujets du roi, de
nommer dans les prevotes un certain nombre d'hommes sans lesquels
aucune atfaire concernant les villes ne pouvait etre decidee, de sur-
veiller ces magistrats, furent entre les mains de saint Louis une arme
puissante dirigee contre les prerogatives feodales. Ce prince fit in-
struire dans le droit romain ceux qu'il destinait aux fonctions de
bziillis; il etendit leur pouvoir en dehors des tribunaux en les char-
geant de la haute administration, et bientot ces hommes devoues
1 Le comte licugnot, Instit. de saint Louis.
2 Guill. de Nangis.
53016111. de J. sire de Joinville, publ. par M.
de Wailly, p
261.