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zontale, toute sculpture qui arretait le regard et Fempechait de suivre
sans interruption les lignes verticales de l'architecture, genaient evidem-
ment les maitres. Pour dissimuler l'importance deja si minime des chapi-
teaux, les architectes reduisent le tailloir a un filet ou un boudin "tres-lin
masque par la saillie des feuillages; si ce tailloir existe encore, on le soup-
conne a peine; il n'est plus qu'un guide pour le sculpteur, une assiette,
pour qu'en posant le sommier, on ne brise pas les sculptures.
Vers le milieu du xve siecle, on supprime generalement le chapiteau,
qui ne reparait qu'au commencement de la renaissance, en cherchant
a se rapprocher des formes antiques. Si, par exception, le chapiteau existe
encore de 1h50 a 1h80, il est bas, decore de feuillages tres-decoupes, de
chardons, de ronces, de passiflores; son astragale est lourd, cpais et son
tailloir maigre. Ce dernier chapiteau n'est plus reellement qu'une bague.
Parfois aussi, dans les edifices du xve siecle, on rencontre des chapi-
teaux a figures, mais qui sont plutot des caricatures ou des represen-
tations de fabliaux en vogue que des legendes sacrees.
No us avons dit un mot des chapiteaux normands du xm" siecle, lorsque
l'architecture de cette province cesse d'etre une copie de l'architecture
francaise du regne de Philippe-Auguste. Au moment ou les architectes de
Flle-de-Franee, de la Champagne, de la Picardie et de la Bourgogne aban-
donnent le tailloir carre pour adopter les formes polygonales se penetrant
en raison de la disposition des arcs des voütes, et afin d'eviter les angles
saillants et les surfaces horizontales inutiles, les appareilleurs normands
ne prennent pas tant de soin; ils evitent ces traces compliques et qui ne
pouvaient etre arretes que lorsque les lits des sommiers, et par eonsequent
la place, la forme et la direction des arcs etaient connus; ils prennent un
parti qui supprime les combinaisons geometriques rectilignes, et donnent,
vers 1230, aux "tailloirs des chapiteaux, la forme circulaire toutes les fois
que la disposition des piles le leur permet, et surtout (cela va sans dire)
lorsque ces piles sont monocylindriques. Les cathedrales de Coutances, de
"Bayeux, de Dol, du Mans, de Seez, Yeglise d'Eu, nous donnent de nom-
breux exemples de ces chapiteaux a tailloirs en forme de disque. Ce qu'ils
font pour les chapiteaux, ils le font egalement pour les bases (voy. BASE).
Nous donnons(fig. 52) un chapiteau en deux assises d'une des piles de la
nef de la cathedrale de Seez, construite vers cette epoque (1230), et (fig. 53)
un chapiteau d'une des colonnettes de l'arcature interieure de la meme
eglise appartenant aux memes constructions. Deja, dans le gros chapiteau,
les feuilles sont sculptees d'une faeon seche et manieree, qui est bien eloi-
gnee de la souplesse des ornements du meme genre appartenant a l'Ile-de-
France ou a la Bourgogne. Il y a quelque chose d'uniforme dans le faire
et la composition de cette sculpture, une grande pauvrete d'invention, et le
desir de produire l'effet par la multiplicite des details et la recherche de
Pexecution. Ce defaut est plus sensible encore dans les ediüces anglais de
cette epoque. Il faut dire aussi que les sommiers des arcs paraissent mal
soutenus par ces tailloirs circulaires, qui n'indiquent plus, comme les faces