L CATHEDRALE 23h
attribuer cela a un refroidissement religieux? Nous ne le pensons pas; la
nation, sentant desormais un pouvoir superieur a la feodalite, portait ses
regards vers lui, et nüäprouvait plus le besoin si vif, si pressant, d'elever
la cathedrale en face de la forteresse feodale.
A la {in du XIIIÜ siecle, celles de ces vastes constructions qui etaient
tardivement sorties de terre n'arriverent pas a leur developpement, elles
sarreterent tout a coup; si elles furent achevees, ce ne fut plus que par
les efforts personnels düäveques ou de chapitres qui employerent leurs
propres biens pour terminer ce que Fentrainement de toute une popula-
tion avait permis de commencer. Il n'est pas une seule cathedrale qui ail
etc finie telle qu'elle avait ete projetee, et cela se comprend: la periode
pendant laquelle les grandes cathedrales eussent du ctre concues et
elevees, celle pendant laquelle leur existence est pour ainsi dire un besoin
imperieux, l'expression d'un desirnational irresistible, est comprise entre
les annees 1180 et 12110. Soixante ans! Si l'on peut s'etonner d'une
chose, c'est que, dans ce court espace de temps, on ait pu obtenir, sur
tout un grand territoire, des resultats aussi surprenants; car ce n'etait
pas seulement des manoeuvres qu'il fallait trouver, mais des milliers
d'artistes qui, la plupart, etaient des hommes dont le talent d'cxecution
est pour nous aujourd'hui un sujet d'admiration.
Tel etait alors, en France, le besoin d'agrandir les cathedrales, que,
pendant leur construction meme, les premiers travaux deja exccutes en
partie furent parfois detruits pour faire place a desiprojets plus grandioses.
En dehors du domaine royal, le mouvement n'existe pas, et ce n'est que
plus tard, vers la fin d11 XIIIB siecle, lorsque la monarchie eut a peu pres
reuni toutes les provinces des Gaules a la France, que l'on entreprend la
reconstruction des cathedrales. C'est alors que quelques diocesesrempla-
cent leurs vieux monuments par des constructions neuves elevees sur des
plans sortis du domaine royal. Mais ce mouvement est restreint, timide,
et il sarrete bientot par suite des malheurs politiques du xive siecle.
A la mort de Philippe-Auguste, en 1223, les principales cathedrales
comprises dans le domaine royal etaient celles de Paris, de Chartres, de
Bourges, de Noyon, de Laon, de Soissons, de Meaux, d'Amiens, d'Arras,
de Cambrai, de Rouen, d'Evreux, de Seez, de Bayeux, de Coutances, du
Mans, d'Angers, de Poitiers, de Tours; or, tous ces dioceseiavaient rebati
leurs cathedrales, dont les constructions etaient alors fort avancecs. Si
certains dioceses sont politiquement unis au domaine royal et se recon-
naissent vassaux, leurs cathedrales s'elevent rapidement sur des plans
nouveaux comme celles de la France. Les dioceses de Reims, de Sens, de
Chalons, de Troyes en Champagne, sont les premiers a suivre le mouve-
ment. En Bourgogne, ceux d'Auxerre et de Nevers, les plus rapproches
du domaine royal, reconstruisent leurs cathedrales; ceux d'Autun et de
Langres, plus eloignes, conservent leurs anciennes eglises elevees vers le
milieu du x11" siecle.
Dans la Guyenne, restee anglaise, excepte Bordeaux, qui tente un effort