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BOURSE
BOURSE, s. f. Dans les anciennes villes franches du Nord, des Flandres
et de la Hollande, le commerce prit, des le XIVC siecle, une si grande
importance, que les negociants etablirent des locaux destines a leurs
reunions journalieres, afin de faciliter les transactions. Ges batiments,
veritables basiliques des marchands, se composaient de vastes portiques
entourant une cour. Au-dessus des portiques etaient menagces des gale-
ries couvertes. Un beffroi, muni d'une horloge, accessoire indispensable
de tout etablissement municipal, etaitjoint aux batiments. Les villes de
France ne prirent pas, pendant le moyen age, une assez grande importance
commerciale, ou plutOt les negociants ne composaient pas 1m corps assez
homogene et compacte pour elever des bourses. A Paris, on se reunissait
aux halles ou sous les piliers de Yhotel de ville. Dans les grandes villes
du Midi, qui conserverentleur regime municipal au milieu de la feodalite,
comme Toulouse, par exemple, c'etait sur la place publique que se trai-
taient, en plein air, les affaires de negoce. Mais en France, c'etait surtout
dans les grandes assemblees connues sous le nom de foires que toutes les
transactions du gros commerce avaient lieu; et ces foires, etablies a
certaines epoques fixes de Fannee sur plusieurs points du territoire, dans
le voisinage des grands centres industriels ou agricoles, attiraient les
negociants des contrees environnantes. La, non-seulement on achetait et
l'on vendait des produits et denrees zipportes sur place, mais on traitait
dütlltiires a long terme, on faisait (Fimportzintes commandes, dont les de-
lais de livraison et les payements etaient fixes presque toujours a telle ou
telle autre foire; car le commerce, pendant le moyeu age, n'avait pas
düntermediaires entrele fabricant et le debitant. Lesjuifs, qui alors etaient
les seuls capitalistes, faisaient julutot l'usure que la banque. Un tel etat de
choses, qui existaitsur tout le territoire de la France, ne uecessitait pas,
dans les grandes villes, Petablissement d'un centre commercial; tandis
que les villes libres du Nord, des le XIVe siecle, villes la plupart maritimes
ou en communication directe avec la mer, avaient deja des correspondants
a Fetranger, des comptoirs, et speculaicnt, au moyen de billets, sur la
valeur des denrees ou produits dont la livraison etait attendue. En France,
le negociant faisait ses affaires lui-moine, recevait et payait, revendait au
debitant sans intermediaire; un local public destine a Fechange des valeurs
ne lui etait pas necessaire ; traitant directement dans les foires avecle fabri-
cant ou le marchand nomade, payant comptant la marchandise achetee,
ou a echeance la marchandiseffcommandee a telle autre foire, il n'avait
de relations qu'avec la clientele qu'il s'etait faite, et ne connaissait pas
le mecanisme moderne du haut negoee; mecanisme au moyen duquel le
premier venu, qui n'a jamais vendu un gramme d'huile et n'en vendra
jamais, peut acheter plusieurs milliers de kilogrammes de cette denree,
et, sans en toucher un baril, faire un benefice de "'10 pour 100. Les
grands marches periodiques ont longtemps preserve le negoce en France
de ce que nous appelons la speculation, ont contribue alui conserver, jus-
qu'au commencement du sieclc, une reputation de probite traditionnelle.
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