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ARMOIRIES
furent montres devant les inüdeles; lorsque, revenus des champs de
bataille de YOrient, les ehretiens occidentaux rapporterent avec eux ces
armes peintes, ils durent les conserver autant comme un souvenir que
comme une marque honorable de leurs hauts faits. De tout temps les
hommes qui ont affronte des perils ont aime a conserver les temoins
muets de leurs longues souffrances, de leurs eiforts et de leurs succes.
Les armes emaillees de couleurs varices, de figures singulieres, portant
la trace des combats, furent religieusement suspendues aux murailles
des chateaux feodaux; detait en face d'elles que les vieux seigneursr
racontaient leurs aventures d'entre-mer a leurs enfants, et ceux-ci s'ha-
bituaient a considerer ces ecus armoyes comme un bien de famille, une
marque d'honneur et de gloire qui devait etre conservee et transmise de
generation en generation. C'est ainsi que les armoiries prises d'abord
pour se faire reconnaitre pendant le combat, devinrent hereditaires
comme le nom et les biens du chef de la famille. Qui ne se rappelle avoir
vu, apres les guerres de la revolution et de l'empire, un vieux fusil
rouille suspendu au manteau de la c-heminee de chaque chaumiere?
Les armoiries devenues hereditaires, il fallut les soumettre a de cer-
taines lois fixes, puisqu'elles devenaient des titres de famille. ll fallut bla-
sonner les armes, dest-ä-dire les expliquer 1. Ce ne fut toutefois que vers
la fin du xue siecle que l'art heraldique posa ses premieres regles2;
pendant le XIIIÜ siecle il se developpa, et se fixa pendant les XIVe et
xve siecles. Alors la science du blason etait fort en honneur; detait
comme un langage reserve äla noblesse, dont elle etaitjalouse et quielle
tenait a maintenir dans sa purete. Les armoiries avaient pendant le
XIVB siecle pris une grande place dans la decoration, les etoffes, les vete-
ments : c'est a ors que les seigneurs et les gens de leurs maisons portaient
des costumes armoyes. Froissart, dans ses Chroniques, ne fait pas paraitre
un noble de quelque importance sans faire suivre son nom du blason
de ses armes. Les romans des X1118 et XIVB sieeles, les proces-verbaux de
fetes, de ceremonies, sont remplis de descriptions heraldiques. Nous ne
pouvons dans cet article que donner un apercu sommaire de cette science,
bien quielle soit d'une grande utilite aux architectes qui s'occupent d'ar-
cheologie. Faute d'en connaitre les premiers elements, nous avons vu de
notre temps commettre des bevues dont le moindre inconvenient est de
1 Blasonner vient du mot allemand blasen (sonner du cor) : a (Ifetait autrefois la cou-
a fume de ceux qui se presentaicnt pour entrer en lice dans les tournois, de notifier ainsi
u leur arrivee; ensuite les lierauts sonnaienf. de la trompette, blasonnaient les armes des
u chevaliers, les (Iecrivaient ä haute voix, et se räpandaient quelquefois en eloges au sujet
a de ces guerriers. (Nouv. Mltlzod. du blason, ou FArt Izdmld. du P. Menestrier, mise
dans un meilleur ordre, etc., par M. In-8, Lyon, 1'770.)
2 a Louis le Jeune est le premier de nos rois qui soit represente avec des fleurs de lys
m1 la main et sur sa couronne. Lorsqu'il lit couronner son fils, il voulut que la dalmatiqne
a et les bottines du jeune prince fussent de couleur d'azur el scmees de fleurs de lys d'or. n
(lbizL)