A RCHITECTUHE
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merent a leur tour (que leur restait-il d'ailleurs et formerent les
terribles compagnies des Jacques. Ces troupes de soldats brigands, licen-
ciees, abandonnees a elles-memes apres les defaites, se ruaient sur les
villes et les chateaux : a Et toujours gagnoient povres brigands, dit
a Froissart, a derober et piller villes et chateaux, et y conqueroient
u si grand avoir que c'etoit merveille... Ils epioient, telle fois etoit, et
a bien souvent, une bonne ville ou un bon chatel, une journee ou deux
u loin; et puis sassembloient vingt ou trente brigands, et s'en alloient
a tant de jour et de nuit, par voies couvertes, que ils entroient en celle
a ville ou en cel chalel que epie avoient, droit sur le point du jour
a et boutoient le feu en une maison ou en deux. Et ceux de la ville
a cuidoient que ce fussent mille armures de fer qui vouloient ardoir leur
a ville : si senfuyoient qui mieux mieux, et ces brigands brisoient mai-
a sons, collres et ecrins, et prenoientquant qu'ils trouvoient, puis s'en
u alloient leur chemin, charges de pillage... Entre les autres, eut un bri-
u gand en la Languedoc, qui en telle maniere avisa et epia le fort chatel
u de Combourne qui sied en Limosin, en tres-fort pays durement. Si che-
a vaucha de nuit a tout trente de ses compagnons, et vinrent a ce fort
a chatel, et Pechellerent et gagnerent, et prirent le seigneur dedans que
a on appelloit le vicomte de Combourne, et occirent toute la niaisnee
a de leans, et mirent le seigneur en prison en son chatel meme, et le tin-
a rent si longuement, qu'il se ranqonna a tout vingt-quatre mille ecus
u tous appareilles. Et encore detint ledit brigand ledit chatel et le garnit
a bien, et en guerroya le pays. Et depuis, pour ses prouesses, le roi de
a France le voulut avoir de-lez lui, et acheta son chatel vingt mille ecus;
u et fut huissier d'armes du roi de France, et eut grand honneur de-lez 1e
a roi. Et etoit appelle ce brigand, Bacon. Et etoit toujours monte de bons
u coursiers, de doubles roncins et de gros palefrois, et aussi bien arme
a comme un comte et vetu tries-richement, et demeura en ce bon etat
a tant qu'il vesquit. n Voici le roi de France qui traite avec un soldat de
fortune, lui donne une position superieure, l'attache a sa personne : le roi
fait ici pour la defense du territoire un grand pas; il va chercher les de-
fenseurs du sol en dehors de la feodalite, parmi des chefs sortis du peuple.
C'est avec ces compagnies, ces soldats sans patrie, mais braves, habitues
au metier des armes, avec ces routiers sans foi ni loi, que du Guesclin
va conquerir une a une toutes les places fortes tombees entre les mains
des Anglais. Le malheur, le desespoir, avaient aguerri les populations;
les paysans eux-memes tenaient la campagne et attaquaient les chateaux.
Pour conquerir une partie des provinces francaises,les Anglais n'avaient
eu a lutter que contre la noblesse feodale; apres avoir pris ses chateaux
et domaines, et ne trouvant pas de peuple sous les armes, ils ne laisserent
dans leurs places fortes que des garnisons isolees, peu HOmÜPGÜSÜS, 111161-
ques armures de fer soutenues d'un petit nombre d'au-chers : les Anglais
pensaient que la noblesse feodale francaise sans armee ne PÜÜVÜÜ, mälgfä
cccxxnv, zädit.
Froissart, chap.
Buchon.