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ARCHITECTURE
de Froissart que nous donnons en note tout au long, fait comprendre
ce quüätait pendant la premiäre moitie du Xlv" siecle une armee fran-
Qaise, et quel peu de cas la noblesse faisait de ces troupes de bidauds,
(cjns a terre tout bellement,_sitot qutils virent les Frangois approcher, ils se levizrent
a moult ordonnement, sans nul effroi, et se rangerent en leurs batailles (divisions), celle
a du prince tout devant, leurs archers mis en maniere d'une herse (formant une ligue
dentelee de maniere a ne pas se gener les uns les autres pendant le tir), a et les gens
u d'armes au fond de la bataille. Le conte de Narliantonne et le conte d'Arondel et leur
a bataille, qui faisaient la seconde, se tenoient sur aile bien ordonnement, et avises et
a pourvus pour conforter le prince, si besoin etoit. Vous devez savoir que ces seigneurs,
a rois, ducs, contes, barons frangois, ne vinrent mie jusques la tous ensemble, mais l'un
a devant, l'autre dcrriere, sans arroy et sans ordonnance. Quand le roi Philippe vint jus-
a ques sur la place ou les Anglois etoient pres de u arretes et ordonne-s, et il les vist, le
a sang lui mua, car il les heoit; et ne se fut adonc nullement relrene ni abstenu d'eux
a combattre, et dit a ses mareschaux : a Faites passer nos Gennevois devant et commencer
a la bataille, au nom de Dieu et de monseigneur saint Denys. n La avoit de cesdits Gennevois
a arliailctriers, environ quinze mille qui eussent eu aussi cher neant que commencer
a adonc la bataille; car ils etoient durement las et travailles d'allier a pied ce jour plus
a de six lieues, tous armes, et de leurs arhaletres porter; et dirent adonc a leurs
a connetables qu'ils ifütoient mie adonc ordonnes de faire grand exploit de bataille.
a (les paroles volereutjusques au conte dllllengon, qui en fut durement courrouce et dit 1
a On se doit bien charger de telle ribaudaille qui taillent au besoin..... n
a Quand les Gennevois furent tous recueillis et mis ensemble, et ils durent appro-
a cher leurs ennemis, ils commenceront a crier si tres-haut que ce fut merveilles, et le
a firent pour ebaliir les Anglois : mais les Anglois se tinrent tous cois, ni oncques n'en
a firent semblant. Secoudemcnt encore crierent eux aussi, et puis allerent un petit pas
a en avant: et les Anglois restoient tous cois, sans eux mouvoir de leur pas. Tiercement
a encore crieront moult haut et moult clair, et passeront avant, et tendirent leurs arba-
a letres et commenceront a traire. Et ces archers dhllngletcrre, quand ils viirent cette
a ordonnance, passeront un pas en avant, et puis tirent voler ces sagettes de grandTacon,
a qui enlrerent et descendirent si ouniement sur ces Gennevois que ce scmhloit neige.
a Les Gennevois, qui n'avoient pas appris a trouver tels archers qui sont ceux d'Angle-
a terre, quand ils sentirent ces sagettes qui leur pcrgoient bras, letes et ban-levres
a (le visage), furent tantost deconlits; et couperent les plusieurs les cordes de leurs arcs et
r: les aucuns les jetoient jus : si se mirent ainsi au retour.
a Entre eux et les Frangois avoit une grandlhaie de gens d'armes, montes et pares
c: moult richement, qui regardaient le convenant des Gennevois; si que quand ils cuiderent
a retourner, ils ne purent, car le roy de France, par grand mautalent, quand il vit leur
c: povre arroy, et qu'ils deconlisoient ainsi, commanda et dit: a Or tät, tuez toute cette
a ribaudaille, car ils nous empeschent la voie sans raison. n La vissiez gens (l'ai-mes en tous
a lez entre eux ferir et frapper sur eux, et les plusieurs trebucher et cheoir parmi eux,
a qui oncques ne se relevercnt. Et toujours traioient les Anglois en la plus grandpresse, qui
a rien ne perdait de leur trait; car ils empalloient et lesoient parmi le corps on parmi
a les membres gens et chevaux qui la cheoicnt et trebuchoient a grand meschef, et ne
üpouvoignt 5m; rgleves, si ce n'etoit par force et grandüiide de gens. Ainsi se commenga
u la bataille entre Broye et Crecy en Ponthieu, ce samedi a heure de vespres. n (Froissart,
Bataille de Cräcy, chap. cctxxxvu.)