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breux aux couvents, etlivree des le xniesiecle exclusivementa la carriiire
des armes, commencant a dedaigner la vie religieuse, qui n'oll"rait plus
qu'une existence interieure et bornee, elle laissa bientot ainsi les ordres
monastiques tomber dans un etat qui ressemblait passablement acelui de
riches et paisibles proprietaires reunis en commun sous une discipline
qui devenait de moins en moins rigide. Bientot les abbes, c-onsideres par
le roi comme des seigneurs feodaux, ne pouvaient, comme tels, se mettre
en dehors de l'organisation politique etablie : tant que les pouvoirs
seculiers etaient divises, il leur etait possible, sinon facile de maintenir
et meme d'accroitre le leur; mais quand ces pouvoirs feodaux vinrent se
confondre dans la royaute basee sur Funite nationale, la lutte ne pouvait
durer; elle n'avait pas de but d'ailleurs, elle etait contraire a l'esprit
monastique, qui n'avait fait que tracer la route aux pouvoirs pour arriver
a Funite. Les grands etablissements religieux se resignerent donc, et
tresserent de paraitre sur la scene politique. L'ordre du Temple seul, par
sa constitution, put continuer a jouer un role dans Flitzit, et a prendre
une part active aux affaires exterieures; reunissant les restes de la puis-
sance des ordres religieux et la force militaire, il dut faire ombrage b. la
royaute, et l'on sait comment, au commencement du xlv" siecle, cette
institution fut aneantie par le pouvoir monarchique.
L'influence de la vie militaire sur la vie religieuse se fait sentir des le
xme sieele dans l'architecture monastique. Les constructions eleveesparles
abbes a cette epoque se ressentent de leur etat politique; seigneurs feo-
daux, ils en prennent lesallures. Jusqu'alors si les couvents etaient entoures
d'enceintes, (fctaient plutot des clotures rurales que des murailles propres
a resister a une attaque a main armee; mais la plupart des monasteres
que l'on batit au X1118 siecle perdent leur earactere purement agricole pour
devenir des villce fortitiees, ou meme de veritables forteresses, quand la
situation des lieux le permet. Les abbayes de l'ordre de (liteaux, erigees
dans des vallees creuses, ne permettaient guere l'application d'un systeme
defensif qui eut quelque valeur; mais celles qui appartenaient a d'autres
regles de l'ordre benetlictin, construites souvent sur des penchants de
coteaux, ou meme des lieux escarpes, s'entourent de defenses etablies de
facon a pouvoir soutenir un siege en regle, ou au moins se mettre a l'abri
d'un coup de main. Parmi les abbayes qui presentent bien nettement le
caraetere d'un etablissement a la fois religieux et militaire, nous citerons
l'abbaye du ltlont-Saint-ltlichel en mer. Fondee, si l'on en croit les legendes,
vers la fin du Ville siecle, ellefutaplusieurs reprises devastee par les guerres
et les incendies. En 11203, devenue vassale du domaine royal, elle fut
presque totalement reconstruite par 1'abbe.lourdztin au moyen de sommes
considerables que lui envoya Philippe-Auguste; les batiments nouveaux
furent continues par les successeurs de cet abhe jusque vers 1260.
Le montSaint-Michel est situe au fond d'une baie sablonneuse couverte
chaque jour par FOcean aux heures des marees, non loin de Pontorson et
d'Avranches. (Yetait un point militaire important a cette epoque Qü 1a