ARCHITECTURE
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marbre, la terre cuite, les pierres dures ou friables, de dimensions ame-
rentes, commandent des formes propres a chacune de ces matieres; et cela
d'une fagon S1 absolue, si bien caracterisee, qu'en examinant un moulage
ou un dessin, on peut dire, a cet ornement, cette moulure, ce membre
d'architecture, s'appliquent ä. telle ou telle matiere n. Cette qualite essen-
tielle appartient aux arts originaux des belles epoques, tandis qu'elle
manque le plus souvent aux arts des epoques de decadence; inutile de dire
combien elle donne de valeur et de charme aux moindres objets. Le judi-
cieux emploi des materiaux distingue les constructions du Xlllc siecle entre
celles qui les ont prccedees et suivies; il seduit les hommes de goüt comme
les esprits les plus simples, et il ne faut rien moins qu'une fausse educa-
tion pour faire perdre le sentiment d'une loi aussi naturelle et aussi vraie.
Mais il n'est pas d'oeuvre humaine qui ne contienne en germe, dans son
sein, le principe de sa dissolution. Les qualites de l'architecture du xme
siecle, exagerees, devinrent des defauts. Et la marche progressive etait si
rapide alors, que l'architecture gothique, pleine de jeunesse et de force dans
les prcmieres annees du regne de saint Louis, comrneneait a tomber dans
l'abus en 4260. A peine y a-t-il quarante ans entre les constructions de la
faeade occidentale et du portail meridional de la cathedrale de Paris; la
grande faeade laisse encore voir quelques restes des traditions romanes; et
le laortail sud est d'une architecture qui fait pressentir la decadcnce (voy.
ARCHITECTURE RELIGIEUSE). On netrouve plus desla lin du xnicsiecle, surtout
dans l'architecture religieuse, ce cachet individuel qui caracterise chacun
des edifices types du commencement de ce siecle. Les grandes dispositions,
le mode de construction et d'ornementation, prennent deja un aspect
monotone qui rend l'architecture plus facile a etudier, et qui favorise la
mediocrite aux depens du genie. On sapercoit que des regles banales
setablissent et mettent l'art de l'architecture a la portee des talents les plus
vulgaires. Toutse prevoit, une forme en amene infailliblement une autre,
Le raisonnement remplace l'imagination, la logique tue la poesie. Mais
aussi Fexecution devient plus egale, plus savante, le choix des materiaux
plus judicieux. ll semble que le genie des constructeurs, n'ayant plus rien
a trouver, satisfasse son besoin de nouveaulä en s'appliquant aux dgmils,
recherche la quintesccnce de l'art. Tous les membres de l'architecture
süunziigrissent, la sculpture se comptait dans Fexecution des infiniment
petits. Le sentiment de l'ensemble, de la vraie grandeur, se perd; on veut
etonner par la hardiesse, par l'apparence de la legerete et de la finesse. La
science l'emporte sur l'art et Fabsorbe. C'est pendant le XIVe sieele que
se developpent la connaissance des poussees des voutes, l'art du lraitf
Cfestalors qu'on voit s'elexiei' ces monuments qui, reduisant les pleins a desi
dimensions aussi restreintes que possible, font penetrer la lumiere dans
les interieurs par toutes les issues praticables; qu'on voit ces Haches
decotipees selancer vers le ciel sur des points d'appui qui ne paraissent
pas pouvoir les soutenir; que les moulures se divisent en une quantitc de
membres inlinis; que les piles se composent de faisceaux de colonnettes