ARCHITECTURE
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saperooit que l'art de l'architecture progresse dans la voie nouvelle sous
l'influence d'hommes reunis par une communaute de principes, mais
conservant encore leur physionomie et leur originalite personnelles. Les
uns, encore attaches aux traditions romanes, plus timides, nappliquent
qu'avec reserve la methode syntlietique; d'autres, hardis, Fadopteiit
rcsolument : c'est pourquoi on trouve, dans certains ediFices liatis simul-
lanement a la Fin du x11" siecle et pendant les premieres annecs du X1112
des differencesnotables dans le systeme de la construction et dans la
decoration; des essais qui serifiront de point de depart a des regles suivies,
ou qui seront abandoniies peu apres leur apparition. Ces artistes qui
marchent dans le moine sens, mais en conservant leur genie propre,
forment autant de petites ecoles provinciales qui chaque jour tendent 51
se rapprocher, et ne dilfereiit entre elles que par certaines dispositions
de detail d'une medioere importance.
Des 1220 ces ecoles peuvent etre ainsi classees: ecole de Flle-de-France,
ecole de Champagne, ecole de Picardie, ecole de Bourgogne, ecole du Maine
et de YAnjou, ecole de Normandie. Ces divisions ne sont pas tellement
trancliees qu'on ne puisse rencontrer des edifices intermediaires appar-
tenant äi la fois a l'une et a l'antre; leur developpemcnt suit l'ordre que
nous donnons ici. On batissait deja dans Flle-de-France et la Champagne
des edilices absolument gothiques, quand l'Anjou et la Normaiidie, par
exemple, se debarrtissaienta peine des traditions romanes, et ifadoptaient
pas le nouveau mode de construction et de decoration avec toutes ses coii-
sequences rigoureuses (voy. pour les exemples, ARCHITECTURE lHELlGlEUSE,
iiioNAsTioun, CIVILE et MILITAIRE). Ce n'est qu'a la fin du Xllle siecle que
ces distinctions s'cil'acent completement, que le genie provincial perd
son originalite pour se fondre dans une seule architecture, qui s'etend
successivement sur toute la superlicie de la France. 'l'onte1'ois I'Auvergiie
(sauf pour la construction de la cathedrale de Clerniont-Ferranrl) et la
Provence nhdopterent jamais l'architecture gothique, et cette dcrniere
province (devenue fFIIUQHi-"SO Seulement a la {in du xv" siecle) passa de l'ar-
chitecture romane degenereeäi l'architecture dela renaissance, n'ayantsubi
Vinlluence des monuments du Nord que fort tard et d'une inaniere incom-
plete. Le foyer de l'architecture francaise est donc au X1118 siecle concentre
dans le (lomriine royal; c'est la que se batissent les immenses catliedrales
que nous admirons encore auiourdihui, les palais somptueux, les grands
etalalissenients publics, les chateaux et les enceintes formidables, lesriclies
iiionasteres. Mais en perdant de son originalite personnelle ou provinciale,
en passant exclusivement entre les mains des corporations laiqucs, l'archi-
tecture n'est plus executee avec ce soin minutieux dansles details, avec cette
recherche dans le choix des materiziux, qui nous frappent dans les edifices
batis a la fin du Xlle siecle, alors que les architectes laiques etaient encore
imbus des traditions monastiques. Si nous mettons de cote cpielques rares
edifices, comme la sainte Chapelle du Palais, comme la cathedrale de
llcinis, comme certaines parties de la cathedrale de Paris, nous pourrons